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Des antidotes à la peur : l’inventaire-BiBi.

COURIR

La peur. La peur qui obstrue tout jugement. La peur dont on sait qu’elle peut être une arme de dissuasion massive contre tout éclairage, toute volonté d’explication et de compréhension. La peur, indiscutable, qui vient figer nos corps ou qui accélère notre pouls. La peur qui n’en devient que plus redoutable lorsqu’on se sent isolé. Car la solitude renforce ce sentiment de peur, de cette peur qui n’a rien de pathologique. C’est pour cela qu’il est bon de voir, de lire tous ces messages, ces digressions, ces lettres, ces tweets, ces blagues qui cachent le désespoir, ces sentences sentencieuses, ces éclats de rire, ces coups de colère, bon de parler même à ceux qui n’écoutent que d’une oreille distraite, bon de se répéter…

TS Lawrence écrivait justement ceci : «J’avais peur d’être seul et d’offrir aux vents du hasard une âme vide qu’ils emporteraient». Et lorsque la peur s’incruste, insiste, perdure jusqu’à vous rendre blême du Matin-Courage jusqu’au Soir-Désespoir, il faut faire un énième effort. Sans se voiler la face : le chemin sera long – c’est une épreuve – pour suivre jusqu’au bout Georges Haldas écrivant ceci : «C’est quand on se sent le plus ravagé intérieurement qu’il faut accomplir avec le plus de minutie nos devoirs quotidiens».

«La haine des enfants traverse les siècles ».

Terrible phrase de vérité que celle trouvée dans le livre de Pierre Péju («Enfance obscure»). Les enfants sont les premières victimes de la brutalité de ce Monde. Certains se suicident, d’autres – grandissant – passent leur rage sur les biens ou sur les personnes. La haine des enfants reste souvent une constante cachée derrière les projets politiques. Déclarés «dangereux», ils sont bien utiles pourtant aux dictatures et aux Ministres de l’Intérieur qui se succèdent. Ils traversent les siècles avec l’errance et la mort au bout du chemin,  avec l’exploitation, le viol, la vente, les abus aux coins sombres de nos rues. C’est le regard-BiBi de cette fin de semaine.

Réflexions sur la frénésie législative de Sarkozy.

Les sénateurs viennent de désavouer notre Grand Protecteur lors de l’examen du projet de loi sur l’immigration.

Contre l’avis du gouvernement et de la commission, les sénateurs ont refusé de déchoir de leur nationalité les meurtriers de représentants de l’autorité de l’Etat. Mesure donc rejetée à 182 voix contre 156.

BiBi s’est demandé à quoi peuvent bien servir les lois dont notre petit Chef nous abreuve depuis qu’il est arrivé au sommet de l’Etat ? Quel est donc le sens de cette frénésie législative et – disons-le plus nettement encore – de cette véritable frénésie sécuritaire ?

Evidence-BiBi : la loi ne sert pas à  changer la Société. Retour en amont : épousant l’avis de Laurent Mucchielli, BiBi lui laisse volontiers la parole (1) :

« La loi n’a plus que valeur de symbole et sert surtout à envoyer des messages dans le débat politico-médiatique et à l’électorat. Dernier exemple en date : l’Assemblée Nationale a voté, le 30 septembre 2010, l’extension de la déchéance de nationalité aux Français naturalisés depuis moins de dix ans, condamnés pour meurtre d’agents dépositaires de l’autorité publique. En lisant le débat parlementaire qui a précédé le vote de cette disposition, on y voit un député socialiste poser cette question au [sinistre] Ministre Eric Besson :

« Comme vous êtes féru de statistiques, vous avez sans doute lu les rapports effectués chaque année sur le sujet. Ma question est très précise : au cours des trois dernières années, combien de crimes, parmi ceux évoqués à l’article 3 bis, ont-ils été commis en France, quelle que soit l’origine de ceux qui les ont perpétrés ? Combien de crimes de ce type ont-ils été commis contre des forces de police, des magistrats ou des jurés ? A combien de ces criminels aurait été appliquée la déchéance de nationalité ?»

En d’autres termes, le député demandait s’il y avait un fondement réel à cette mesure. Ni le [sinistre] Ministre ni aucun député ne répondront à la question dans cette séance, pas plus qu’ils n’y avaient répondu en commission parlementaire quand ce député l’avait déjà posée».

Donc notre ex-Ministre de l’Expulsion et notre Président Protecteur n’ont aucune idée sur le nombre de policiers et de gendarmes tués par des personnes de nationalité étrangère chaque année. Et pour cause : aucun rapport, il n’existe aucune évaluation sérieuse pour discuter et – éventuellement – justifier cette loi. Laurent Mucchielli y est allé d’une autre petite recherche :

«Pour la petite histoire, poursuit-il, j’ai fait la recherche de l’info en question et j’ai montré que, si cette loi avait été en vigueur au cours des dix dernières années, CELA N’AURAIT CONCERNE QU’UN SEUL POLICIER (2). Une loi pour un cas. Nous en sommes là».

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  • (1)   L’intervention de Laurent Mucchielli est extraite de la Revue «Lien Social» (son 1000ième Numéro. 13 Janvier 2011). BiBi espère les lire jusqu’au 10000ième et souhaite que le maximum de travailleurs sociaux se jètent sur les articles de haute tenue de ce numéro Collector !
  • (2) Voir l’article «Déchéance de nationalité : la Police a bon dos» sur le site du sociologue. Signalons en outre sa rencontre avec Stéphane Liévin, représentant du syndicat Unité SCP Police parue sur son site et dans le Journal du Droit des Jeunes (JDJ – numéro de décembre 2010).

Les Flèches de BiBi (1-15 décembre).

Céline, le chouchou de Sarkozy ?

Comme déjà dit, Nicolas Sarkozy a invité Fabrice Luchini à l’Elysée – via Alain Carignon. Il paraît – défense de rire – que notre Président s’est pris d’admiration pour l’écrivain Céline. Le problème c’est que lorsque Nicolas évoque Céline, il faut comprendre en réalité : « C’est Line…Renaud ».

Destin de deux grands Gauchistes.

Il est bon de méditer sur les trajectoires de deux grands gauchistes d’antan. Ils se sont connus sur les bancs de Louis-le-Grand et finissent au service de Nicolas-le-Petit. On trouvera dorénavant Denis Olivennes-le-Gros chez Frère Arnaud Lagardère et Henri Weber-le-Vieux, fondateur de la Ligue Communiste Révolutionnaire, dans les petits papiers de Nicolas-le-Petit.

Inrocks (1) : Montebourg dans la semoule.

BiBi s’est payé les Diners de l’Atlantique. Auparavant, il s’était goinfré aux repas du «Siècle». En dévorant le dernier numéro des Inrocks, BiBi est tombé sur le menu d’Arnaud Montebourg, invité du grand Canard incorruptible et il a été servi : couscous au menu. Les infos sont capitales : nous voilà dans un restaurant marocain, le couscous est royal avec, ô surprise, couches de semoule, légumes, saucisse. En fin de repas, Montebourg rajoute sucre et canelle et mélange le tout : ça lui rappelle son pappy maternel d’Algérie. On ne dit pas qui a payé. Ce qui reste sûr, c’est qu’avec cet édito qui pédale dans la semoule, les Inrocks se payent la tête de ses lecteurs.

Inrocks (2) : Des Stars à croquer.

On bouffe, on bouffe dans ce numéro des Inrocks (décembre 2010). Dans un bel élan révolutionnaire, on nous fait part de la fête du Fooding, guide culinaire qui a 10 ans d’âge. Joey Starr a momentanément abandonné sa lecture du Suicidé de la Société d’Artaud pour ressusciter autour d’un «velouté de lentilles vertes du Puy, d’un haddock fumé et d’une crème acidulée à l’aneth». Hey Joey, tu rappes toujours… ton fromage ?

Nicolas Bedos, Louis Bertignac, Miossec se sont jetés sur les «mogottes». Dans un autre coin, les admirateurs d’Arielle Dombasle buvaient ses paroles. Elle avait lancé à Frédéric Mitterrand ces mots imbuvables : «Oh, je suis si heureuse que tu sois resté ministre ! ».

Inrocks (3) : ABBA ou abats ?

Pages 20 à 26, on arrive au plat de résistance : on y pérore sur le groupe «mythique» suédois ABBA. Pour ceux et celles qui ne connaissent pas, Abba est à la rock Music ce que Gilbert Montagné est au Blues. BiBi ira jusqu’à la dernière bouchée de l’entretien avec Björn Ulvaeus :

Les Inrocks : «Quand vous avez arrêté ABBA, était-ce aussi parce que vous sentiez venir le déclin artistique ?» Juste ciel, la question laisse entendre qu’avant le déclin chez Abba, il y aura eu de l’Art ? (Du lard plutôt, non ?). Voilà un repas de huit pages qui commence à peser lourd pour un canard qui se veut aérien. BiBi se demande alors si, pour être plus léger, il ne chanterait pas : «ABBA les Inrocks» ?

Mamita dans la Marmite.

Canal Plus (la Boîte à Questions) a cuisiné Anne Sinclair (surnommée : Mamita) : «Quel est le plus gros défaut de DSK ?» lui a-t-on demandée. Et Anne Sinclair de répondre : «Le sauté de veau». Elle n’a quand-même pas osé rajouter : «… et le boudin blanc».

Flèche de Cœur.

Dans son édito sur les «fantasmes récurrents que les filles deviendraient hyper violentes», Laurent Mucchielli (Journal des Jeunes, numéro de novembre 2010) nous rappelle que «l’intégralité des chiffres qui sont jetés en pâture aux médias et à l’opinion publique sont issus de la statistique de police» et que celle-ci «n’est pas un sondage permanent sur l’état réel de la délinquance en France mais un enregistrement des PV dressés par les fonctionnaires». Pour une vision plus fine sur le phénomène de la violence des jeunes, voir le livre du même sociologue (en collaboration avec Véronique Le Goaziou «La Violence des Jeunes en Question»)

Tournée estivale des Blogs.

1. « Les Bloggeurs deviennent-ils paresseux ? » demande Eric Mainville dans Crises dans les Médias.

Là encore, il n’est de réponse que singulière. Dans un autre billet, le tenancier du blog se posait la question de l’écriture et du Plaisir. Pour BiBi – qui n’échappe pas à la règle – on écrit toujours pour se protéger et pour « être aimé » (Michel Leiris). Se protéger de quoi ?… Peut-être bien de la violence, de la violence de la Vie et de celle de la Mort, notre épée de Damoclès. Cette protection est, bien entendu, en partie un leurre , « a great illusion » car la forteresse de mots que l’on érige pour bien se sentir à l’abri, présente – là et là-bas – d’énormes brèches par où toute la Douleur et le Scandale d’être vivant s’engouffrent.

Pour autant, écrire reste une raison supplémentaire pour continuer de vivre, d’aimer, d’être aimé, dans cette alternance de relâche et de relances, de paresse et d’acharnement.

2. Seb Musset « Le Client est roi » : « D’un côté, les dégoutés du vote me demandent régulièrement si, où, quand et comment l’insurrection va venir alors qu’elle est déjà là… De l’autre, je croise des 25/35 ans écœurés par trois années de gouvernance (…) mais qui n’envisagent aucune alternative. Et bien, du seul point de vue humain qui l’intéresse, le kikavotépourmoi : notre monarque s’en carre ».

Bien entendu que le monarque s’en carre car seul l’intéresse le 50,00001 % au jour J. Et pour cela, la division, la haine de catégories sociales entre elles, la haine née de «problèmes » dits  « ethniques» non seulement servent sa politique mais sont SA politique dans son essence-même. Le voilà qui mobilise ses Amis médiatiques à grande échelle. Les Dir’Com de l’Elysée l’ont compris avec la chute de Chouchou dans les sondages : le seul créneau à prendre d’assaut pour sauver la Patrie UMP, c’est de gagner sur l’extrême-droite. Avec pour appuis, la bassesse des «arguments», les «slogans» répétés jusqu’à l’écœurement, la mobilisation des Intellectuels-Chiens de garde et l’aval d’une partie de la petite bourgeoisie au trouillomètre à zéro.

3. Vogelsong – Blog Piratage(s) – décortique la Machine Radiophonique qui veut nous décerveler. Exemple rapporté : France-Inter organise un débat sur le phénomène de la violence gratuite avec des invités triés sur le volet : «S. Roché criminologue, philosophe de l’insécurité et prix littéraire de la Police Nationale, H. Niel contrôleur général de la Police».

Sur le Train-train habituel de ces pseudo-débats, VogelSong rajoutera avec justesse : « Petits instants médiatiques anodins subtilement glissés entre une tranche affaire d’État et un bout de fait divers qui tourne mal. Anodins, mais bien représentatifs de la façon dont le débat se noue en France. Représentatifs de l’attirance irrépressible pour l’extrême droite. Ce petit côté subversif qui donne le frisson… ». BiBi rajoutera qu’en d’autres temps, certains (beaucoup d’) intellectuels louèrent ces délicieux frissons à l’Université de Weimar guère éloignée de plus de 20 kilomètres du camp de Buchenwald.

4.Vis-à-vis des « gens du Voyage », Laurent Mucchielli rappelle à juste titre que – dans une résolution du 30 juin 2010 – le Conseil de l’Europe avait relevé notamment les problèmes suivants : « création d’un nombre insuffisant d’aires d’accueil, mauvaises conditions de vie et des dysfonctionnements des aires d’accueil, accès insuffisant au logement des Gens du voyage sédentarisés, procédures d’expulsion qui peuvent être mise en œuvre la nuit ou en hiver et comporter des violences injustifiées, discriminations liées à la loi du 3 janvier 1969 notamment concernant le droit de vote, manque de moyens mis en œuvre pour lutter contre l’exclusion sociale, difficultés d’accès au logement des Roms migrants en situation régulière« .