BiBi et Boto-Boto avaient pensé à l’Iran (mais trop de risques), à la Jordanie (mais trop de risques… de tomber sur un tourisme de masse). Finalement, sac à dos, les voilà partis pour quatorze jours en Syrie. La Syrie : le Pays où le Christ fit ses premiers pas et dit ses premiers mots (en langue araméenne). Premier volet du voyage : sur les terres du Christ, la… parabole est partout.
1. En Syrie, il y a une chaine officielle et trois autres programmes qu’on branche via la voie hertzienne ou via la version-satellite. Sur les écrans syriens, prédominent aussi les autres chaines des pays frères du Monde Arabe. Les plus suivies sont celle d’Al Jazeera, celles de Dubaï, de la BBC en langue arabe, celle du Qatar, du Pays d’Oman et celles des réseaux ultra-religieux. On y a toutes informations – pas forcément énoncées par un homme mais le plus souvent par de nombreuses présentatrices, jolies, maquillées, à visage découvert.
2. Dans les fictions, le gouvernement a interdit que les héroïnes soient… voilées. C’est qu’il faut présenter à la Nation des figures modernes qui offrent du Rêve. Les seuls moments où les fictions laissent apparaître des femmes voilées lointaines, ce sont des scènes de rue, des scènes d’extérieurs (hall de gare, escalators de grandes boutiques, souks etc).
3. Pour un français, ce sont France 24, l’insipide chaine de la Reine Christine Okrent-Kouchner et TV5-Monde qui informent et distraient. Antoine d’Alep, 52 ans, est venu une seule fois en France. Il dit avoir appris et perfectionné son français en suivant cette dernière chaîne. Cette semaine, il y a visionné des reportages d’Envoyé Spécial. Il nous parlera aussi de Carla Bruni-Sarkozy, vedette de cinéma dans « Paris Midnight » : « Comment expliquez-vous cela ? Une actrice top-model avec un agité ? Par l’Amour ? » nous interrogea t-il. Et l’écho lui répondit : « Par amour du Pouvoir certainement« .
4. Les écrans de télé sont omniprésents. En campagne reculée, sous les tentes des Bédouins, sur les terrasses des plus beaux hôtels-restaurants comme dans les plus petites boutiques des souks. Dans le dédale des marchés, tout en sourdine, le poste est allumé. Écran plat minuscule, placé au fond de la boutique. On y entend à peine les rire gras enregistrés des émissions aux séquences grosses ficelles. Le tenancier de l’échoppe a du mal à quitter l’écran où sont diffusés beaucoup de films (par exemple, « Le Transporteur » de Luc Besson !) et de séries policières locales. La violence y est surprenante : femmes tirées par les cheveux, insultes, empoignades virulentes et corporelles entre hommes et femmes.
5. Dubaï-Sport reste une chaine très suivie. La Coupe du Monde a connu de gros scores d’audience. On a aimé Zidane (un jeune homme montre son portable : deux vidéos de Zizou marquant ses deux buts en finale 98), on adule le Messi de Barcelone. D’ailleurs, on ne se trompe pas en déclarant que la Syrie est coupée en deux : il y a les pro-Barça et les pro-Real de Madrid. On se souvient à peine de l’Olympique Lyonnais terrassant l’Ogre madrilène en huitièmes de finale de la Champion’s League.
6. Hotel J.Daydé : la terrasse est superbe avec sa vue sur la forteresse illuminée d’Alep… Sauf que sur les côtés, deux écrans géants diffusent les spots publicitaires de la première chaîne. BiBi y remarquera trente secondes de publicité sur les produits L’ Oréal. Les plats commandés mettront une éternité à atterrir sur sa table : ils seront servis tout froid. C’est que les serveurs, eux aussi, en cuisine et en terrasse, ont eu du mal à quitter l’écran géant des yeux.