A table ! C’est l’heure de la soupe !

Ce n’est évidemment pas la première fois que, dans les plaisirs de la table, on peut relier le personnel politique aux hommes et femmes des Médias. Quand il s’agit de réceptions, dîners, déjeuners, fêtes organisées par les Possédants, les « ami-e-s » invité(e)s sont particulièrement triés sur le volet. Via une compétition d’une férocité extrême pour être l’élu(e). Souvenons-nous des épisodes qui concernaient les interviews de Macron. A chaque fois, cela engendrait des haines et des luttes au couteau à l’intérieur du champ journalistique dès lors qu’il y avait un choix à faire dans les intervieweurs.

Mais restons-en aux dîners et déjeuners : ces derniers n’ont pas que le plaisir comme visée. Bien entendu, le but poursuivi en est la perpétuation et la consolidation express du pouvoir en place, toujours plus ou moins aux abois.

Pour ces assoiffés et affamés du PAF, être invité, se mettre à table (au propre comme au figuré), c’est une habitude. On adore ! Et, dans les invité(e)s, on ne trouve pas que des top-cadres médiatiques, il y a aussi des Artistes, des Intellectuels de plus ou moins grande renommée (Historiens, Scientifiques etc). Ils sont aussi très sensibles, très fiers de s’asseoir à la même table. Voyez par exemple l’acteur François Cluzet en extase au dîner de Carlos Ghosn au Château de Versailles. En contrechamp, me revient l’image du Tout-puissant mafieux Robert De Niro dans les Incorruptibles règlant ses comptes à coups de battes de base-ball à table, avant de servir l’apéritif. Une constante plus ou moins violente dans les mafias de tous ordres. Directement politique ou non pour que tout cela entre bien dans vos têtes ! Compris, hein ?

Déjeuner, dîner avec les Dominants, c’est un honneur, une jouissance inégalable, un profit de distinction qui classe son bonhomme médiatique et sa petite dame aux dents longues. N’oublions pas aussi que lorsque le dîner se fait rare, il y a la liaison… téléphonique. Là, vous avez Macron prenant illico des nouvelles de Zemmour soi-disant « agressé dans la rue » par téléphone. Il y a aussi Pascal Praud, ordure zélée, présentateur de CNews, qui a régulièrement au bigophone une certaine première dame.

A propos de celle-ci, rappelons que c’est elle qui présenta son petit Emmanuel autour de la table de Bernard Arnault. Xavier Niel, patron du Monde et compagnon de Delphine Arnault était aussi de la partie. Sarkozy, lui, en recherche désespérément d’une première dame, avait raté Laurence Ferrari dans sa visite discrète à son papa mais il se rattrapa in-extremis autour d’une table. C’est là qu’on lui présenta Carla lors d’un repas en présence de journaleux triés sur le volet et autres crétins moutonniers (Jacques Séguéla). A France 2 tv, nous avons non seulement Nathalie Saint Cricq mais aussi Anne Sophie Lapix dont on loue les rebellions devant le Chef de l’Etat (défense de rire). C’est Challenges qui nous a appris qu’avec son mari (Arthur Sadoun numéro 1 de Publicis) ils dînaient très régulièrement at home avec des patrons du CAC 40. Quant à Hollande, lui, il baffrait à l’Elysée avec les Lagardère boys (Elkabbach en tête).

Et voilà qu’aujourd’hui, nous apprenons sans surprise que les dîners et déjeuners existent aussi sous l’ère de Macron II. Dans le plus grand secret (mais éventré) s’est déroulé un déjeuner où se sont agenouillés et retrouvés les journaleux appartenant à la fine fleur de la Mediacratie. Au menu : « Comment faire pour retourner l’opinion sur cette réforme des retraites qu’il s’agit de faire passer coûte que coûte ? »

Citons les invité(e)s : l’inénarrable Dominique Seux de France Inter (une radio que l’extrême-droite nous présente comme d’extrême-gauche), Nathalie Saint Cricq de France2 tv qui hurle sa haine sur Mélenchon à chacune de ses apparitions TV, Benjamin Duhamel son fiston-à-pistons qui officie dans cette calamiteuse chaîne BFMTV (chaîne reine de l’évasion fiscale) , Guillaume Tabard du Figaro (inutile d’insister sur ce vaurien) et – attention la classe – voilà la représentante du Monde dont on nous serine depuis tant d’années le sérieux et la neutralité : Françoise Fressoz invitée très très régulière de nos TV publiques. En aparté, citons le premier journaliste non-invité qui répercuta allègrement les éléments de langage présidentiel : Yael Goosz de… Libération, évidemment pas en reste.!

HOLLANDE AUSSI.

Tout ce petit monde doit être cité car ce déjeuner – dont tous leurs collègues taisent l’ampleur, les effets, les raisons, le sens – est le prélude à une campagne médiatique sans précédent. Cette solidarité de classe ressoudée ne vient pas à n’importe quel moment. Ce repas est organisé pour resserrer les rangs, pour marcher d’un seul pas contre le populo qui se lève (et pas qu’un peu) contre cette réforme des retraites qui risque de faire basculer le pays dans une horreur jamais vue et subie. Ces enragé(e)s du PAF ont beau plastronner et minimiser l’ampleur de la Révolte contre cette réforme des retraites, ils ne sont pas si naïfs que ça sur le rapport des forces du jour. Les Renseignements Généraux eux ne mentent pas dans leurs remontées à Beauvau et donnent vraiment le pouls du pays à leurs maîtres.

Cette bataille risque de mettre en danger jusqu’à Macron. C’est que plus le pouvoir des Dominants est contesté, plus la lutte s’exacerbe, plus le Pouvoir vis(s)e haut dans les médias et plus il s’organise et fait (va faire) preuve violence dans la rue.

Ce Déjeuner que Macron a essayé de tenir secret est une opération pour appuyer, marteler, pilonner les éléments de langage indispensables pour justifier sa réforme liberticide. C’est aussi via cette violence symbolique que pourra continuer de s’exercer sa domination. Pour la violence physique, Macron est déjà servi : il a déjà passé commande à son serviteur n°1 : Darmanin.

*

PS : Aux dernières nouvelles, les convives étaient au nombre de dix. Il en manquerait donc 4 à l’appel. Il serait d’ailleurs plus interessant de savoir pour qui ils travaillent, de savoir quels sont ces médias présents qui veulent tenir leur présence au secret. Bien inutile d’interpeller, bien entendu, ceux et celles ci-dessus invités déjà nommés : même pas penauds, ils passeraient devant vous la tête haute.

2023. Année de luttes, de respirations, d’amour.

En mars 2023, mon blog fêtera ses 15 années.

Je me suis bien rendu compte qu’en cette année 2022, mes écritures sur le blog ne m’occupent plus autant que les années précédentes. En me retournant, scribe-escargot ou scribe-lévrier, je suis toujours un peu effaré par le nombre de mes billets écrits (1715 !) effrayé aussi d’avoir revêtu si longtemps la panoplie du stakhanoviste. Parfois, je me dis que tout ce remue-ménage, toute cette folie obsessionnelle sont bien inutiles, que je suis resté bien trop longtemps « le concierge de l’événement ».

Mais bien sûr, je me leurre, je l’ai voulu, j’ai persisté, encore et encore. Et je continuerai d’écrire.

Par pulsion. Par rage. Par poussées de fièvre.

C’est que lorsque je regarde l’obscénité du Réel, impossible de ne pas continuer. Pas de désertion possible. Restera toujours ce chemin de l’écriture, cet éternel sentier solitaire. Georges Perros écrivait justement : « L’écriture a cette vertu de nous faire exister quand nous n’existons plus pour personne ». Derrière nos pseudos, nos incises facebookesques, nos fariboles twittesques, existons-nous ? Si oui, alors de quelle existence ? Je vous laisse méditer.

Bien entendu, je continuerai d’écrire.

Ailleurs. aIlleurs. aiLleurs. ailLeurs. aillEurs. ailleUrs. ailleuRs. ailleurS.

Bifurcations nécessaires. Un livre. Des Carnets. De la prose en boîte. Des mots à l’air libre.

Tristement bercé par Pessoa et Léonard Cohen, enjoué par les guitares manouches ou les furies des Stooges, je continuerai de dessiner, de creuser, de concasser, de multiplier les entailles (dites) poétiques, et, aussi, de me reposer, haltes en prose ou encore, temps de pêche au bord des rives romanesques. (Pour les aphorismes, j’ai déjà donné).

Ce dernier billet 2022 ne sera pas celui de la Confession, de l’Intimité. Toujours, il y faut de la réserve, de la retenue. Tout se dit, tout s’écrit en murmures, en fausses pistes qui se révèlent plus vraies que nature, en jeu de cache-cache, en approximations chargées de ruses, en très sérieuses arabesques, en terrains d’aventures, en terrains vagues, là où précisément se disent et s’écrivent les idées les plus précieuses.

Aussi tournons ensemble la page 2022 et ne nous éternisons pas : à toutes, à tous, fidèles lectrices et lecteurs assidus, nouvelles venues, lecteurs occasionnels, à nous tous, souhaitons-nous une bienheureuse et bienveillante année 2023. Une année de luttes, de respirations, de promenades sur la grève, d’ascensions aux pics les plus improbables, une année de rencontres et d’échanges.

Et pourquoi ne pas l’écrire plus crûment ?

Une année d’amour.

Fatigué mais entêté.

« Savoir consume des forces, mais ne pas savoir les épuise »

(Maurice Blanchot. « Le pas au-delà »)

Ne nous voilons pas la face : la période est à la fatigue.

* Fatigue de devoir rappeler que nous sommes dix ans après le début des persécutions contre le toujours emprisonné Julian Assange, fondateur de Wikileaks. Fatigue mais entêtement à le rappeler surtout à toute cette journaille qui regarde ailleurs.

* Fatigue de voir toutes ces commémorations.

Celle du 11 novembre par exemple qui voit tous nos politiques pleurnichant les morts de cette boucherie 1914-1918 en taisant la responsabilité des Etats impérialistes d’alors. A ceux que la fatigue n’a pas submergé, lire et relire le petit opuscule de Lénine («L’impérialisme, stade suprême du Capitalisme»).

* Fatigue sur le silence de ces anniversaires non célébrés par nos si éminents Européens. Ainsi des funestes Accords de Munich (28-29 septembre 1938) qui virent les gouvernements anglais et français baisser leur froc devant le pacifiste Hitler. Oui, fatigue.

*

*Fatigue, écoeurement (mais sans étonnement) de voir les crevures racistes tenant le haut du panier médiatique déverser quotidiennement leur haine du prochain.

*Fatigue à voir surtout les genuflexions ou les silences des Courtisans. Je pense ici aux troupeaux de moutons, de ceux qui plastronnent sur les écrans des milliardaires, qui ont des mots très durs sur le monde d’aujourd’hui mais oublient les mots «Macron, fascisme, Meloni, Darmanin, RN, Hanouna, Bolloré» dans leurs logorrhées.

Hanouna et ses soutiens.

*

*Fatigue de devoir rappeler que, le 15 janvier 2022, Mediapart publiait un article sur les violences sexistes à Radio France, parlant d’un «constat accablant». Sa directrice sarko-macroniste compatible, Sibyle Veil s’engageait à mener une enquête tout azimuth. Pour l’instant, silence dans les rangs radiophoniques. De Léa Salamé à Sophia Aram, de Renaud Dely à Bruno Duvic, de Fabienne Sintès à Marc Fauvelle qui ont pignon sur rue médiatiques.

*

*Fatigue mais entêtement à rappeler les conflits d’intérêts dans le scandale qui touche Agnès Runacher-Pannier, Ministre de la Transition écologique qui a violenté ses enfants en leur ouvrant des comptes dans les paradis fiscaux.

*Fatigue à rappeler ce que font les fils et filles de. Prenons Bolloré. Il a préparé notre présent et notre avenir et surtout celui des Africains depuis longtemps. Voyez les destins de ses deux rejetons Yannick et Chloé. Voyez, pas loin, le coquelet Antoine Arnault et la petite Delphine, copine de Brigitte. Bourdieu parlait déjà de ça dans les Héritiers. Trente ans après, le mécanisme de la reproduction sociale est de plus en plus perfectionné jusqu’à nous épuiser.

*

L’accumulation de scandales, d’exhibitions de pourritures sur nos écrans (quand on les ouvre) sont là, non seulement pour nous éreinter mais pour nous démobiliser et nous pousser à faire les autruchons. En quatre jours de Macronie, on a eu : les obscénités d’un De Fournas, la Ministre Runacher Pannier, le larbin Hanouna et le sinistre de l’Intérieur Darmanin revêtant la panoplie de l’antifasciste et du protecteur de migrants. Où trouver les antidotes contre cette fatigue qu’ils nous inoculent ?

Me souviens de ce vieux bonhomme fatigué sur lequel j’avais fait mon premier clip-vidéo.

« Hier en Italie, à l’âge de 93 ans, est mort un homme qui vivait depuis vingt ans dans les chemins de fer. Il ne cessait d’aller d’un train à l’autre, n’ayant pas d’autre domicile. Ancien député, il disposait de billets gratuits. Sa grande fortune ayant disparu, il ne lui restait plus que ces billets. Il mourut dans la gare principale de Turin, alors qu’il s’apprêtait à changer de train. »

*Fatigue, soupir : chacun sa façon singulière de descendre au Terminus.

*

*Fatigués, bien sûr. Comment ne le serions-nous pas ? Heureusement, d’autres l’étaient et nous ont rapporté leur expérience singulière de résistance.

Imre Kertesz, rescapé d’Auschwitz et de Buchenwald, rapportait ce mot allemand «Weltvertrauen» qu’il avait emprunté à Jean Améry, autre survivant, mot qu’on pourrait traduire par «la confiance accordée au monde». C’est de cette confiance basique, indestructible qui nous préserve du pire, qui nous fait tenir debout malgré nos corps endoloris, malgré le poids de confusion dans nos pensées.

Et c’est encore Jim Thomson («1275 âmes», n° 1000 en Série Noire) qui, du fond de son agitation intérieure, nous en parlait le mieux.

«Je m’appelle Nick Corey. Je suis le shérif d’un patelin habité par des saoulauds, des fornicateurs, des incestueux, des feignasses et des saloupiauds de tout acabit. Mon épouse me hait, ma maîtresse m’épuise et la seule femme que j’aime me snobe. Enfin j’ai une vague idée que tous les coups de pied qui se distribuent dans ce bas monde, c’est mon postère qui les reçoit. Eh bien, les gars, ça va cesser. Je ne sais pas comment, mais cet enfer va cesser». 

*

Bien entendu, cette fatigue infernale ne cessera pas mais, comme tout se termine en musique, on pourra s’arrêter sur cet instrumental qui nous persuadera provisoirement que la Vie l’emportera.

Le courage de Céline.

Peu de gens parlent de son courage

… du courage qu’il lui faut pour se taire devant TOUS (puisque désormais sa parole, consignée en main-courante, est devenue publique).

… du courage qu’il lui a fallu pour faire ces deux cent mètres entre la maison et le Commissariat du quartier.

Du courage, il lui en faudra encore et encore pour tenir bon devant le déferlement médiatico-politique, pour affronter ami(e)s et ennemi(e)s, pour subir probablement les réserves, les sous-entendus dans sa propre famille, les inimitiés dans sa belle famille qui parlera – elle en est sûre – d’un geste impardonnable.

Elle commence à percevoir que, du courage, il lui en faudra pour être tout simplement Céline, femme parmi les femmes, pour repousser l’image à vie d’avoir été celle qui a détruit son mari, celle qui a stoppé la carrière d’un politique prometteur. Et ce cirque autour d’elle n’est pas prêt de s’arrêter. Elle a déjà essuyé toutes sortes d’insultes publiques, un panel incroyable, des insultes avec doigt vengeur, elle a vu ces désapprobations silencieuses, tous ces regards, tous ces murmures, toute cette méchanceté inimaginable, surtout aux sorties d’école et – paraît-il – aussi sur les réseaux sociaux. Elle a déjà entendu Sorcière, Mégère, Souillasse, Balance, Salope, déjà entendu que, merde, il fallait régler ça en privé, et que, bordel, qu’avait-elle besoin d’aller voir les flics pour si peu.

Ils ne savent pas.

Ils ignorent le prix à payer en silence, ils sont dans cet autre monde où tout est nié de cette souffrance qui vous mine et qui vous consume intérieurement. Quoi ? Une gifle serait un simple mouvement d’humeur ? Toute cette histoire, ce serait trois-fois-rien ? Mais que savent-ils du poids d’une gifle balancée par un être qu’on aime, qu’on a aimé et à qui, en toute confiance, on a dit oui pour une vie commune ? Savent-ils seulement que ce cataclysme est pire qu’un coup de grisou, pire qu’un tsunami, qu’un tremblement de terre. Non, ils ne savent pas. Ils résument cette gifle reçue à une douleur physique, à une marque temporaire laissée sur le visage. Et puis, ce genre de choses, ça passe, ca s’oublie vite. Ils n’ont pas idée du poids indicible que pèse ce geste, d’un poids si profond qu’il pénètre dans les chairs, dans les fibres – à l’insu ou non. Ils ignorent que cette main lancée, elle la voit partout, tous les jours, en faisant son lit, en passant l’aspirateur, dans les rayons de Carrefour, aux premières pages du livre qu’elle vient d’ouvrir.

Lors de ses passages télévisés, elle regardait ses mains, elle n’écoutait plus ce qu’il disait, ce qu’il répondait avec ce calme impressionnant qui fait l’admiration de chacun – même hors de leur camp politique. Elle devinait ses mains à plat (celle de droite) sur le pupitre, elle pouvait presque admirer ses justes réparties, sa finesse politique (qu’elle partage) mais pour le reste, en ce qui la concerne, personne ne peut imaginer quelle force il lui a fallu pour repousser la fatigue qui la mortifiait, quelle énergie il a fallu engager pour continuer à jouer son rôle dans la Comédie sociale. Ah cette obligation de paraître digne et parfaite en tous points ! Il n’y a pas que chez les riches qu’on est astreint à tenir son rang. Tenir son rang ? Céline a compris ce que cela veut dire : se taire, se terrer, ne rien laisser paraître. Il y a une semaine encore, accompagnant X à l’école, son amie Josie s’est exclamé « Tu as une mine superbe » alors que son cœur faisait naufrage. L’épouse doit rester à la place assignée de tous temps, de toutes les sociétés, à cette place du retrait, du visage apaisé ou de l’invisibilité.

De plus, il lui a été impossible de trouver une porte ouverte pour s’épancher, se plaindre, dire sa peine, la déposer en toute confiance, impossible de trouver un interstice vivable pour se délester un peu de son effroi, pour partager la dévastation qui a suivi la gifle… geste dont elle ne l’aurait jamais cru capable. Quelle instance pour accueillir sa parole ? Qui dans le Mouvement d’Insoumission pour accepter qu’elle fasse valoir la vérité de cette violence ? Qui pour lui venir en aide ? Où trouver cet espace-là ? Depuis la gifle, personne ne le sait plus qu’elle : tout a changé, absolument tout. C’est que depuis, il est devenu l’homme politique en pleine ascension, le premier et le préféré dans la filiation politique. Se plaindre. Dire la vérité : sacrilège.

Que deviendra le Mouvement ? Elle n’en sait rien mais elle ne regrette rien. Ses amis qui lui tournent le dos, elle s’en désole, elle en pleure mais elle reprend pied et ses insomnies ont quasiment disparu. Elle ne regrette rien. La brèche ouverte dans les têtes et le cœur des gens de Gauche ? Elle est là, elle ira s’élargissant mais, aux épreuves de la vie politique, de la vie tout court, le Futur (proche ou lointain) offrira toujours des solutions. Les espoirs déçus, les fuites en avant, les désertions, les réponses désolantes au plus haut point hiérarchique, les faveurs prioritaires au fils préféré et à la filiation 2027, ce n’est pas de son fait. Que chacun se débrouille avec ! Que chacune s’en arrange ou non !

Et… que la Police ait divulgué le contenu de ses propos, qu’elle les ait vendus au Canard Enchaîné, qu’il se soit agi d’un honteux secret professionnel bafoué… tout cela n’est pas sa priorité, n’est plus vraiment sa question. Il y a des citoyens et des citoyennes pour s’en emparer. Ses fibres à elle restent définitivement, tranquillement ancrées à Gauche. C’est son socle.

Elle a relevé la tête. Le soir, elle pleure toujours un peu avant de trouver le sommeil.

Mais les matins, elle ne joue plus le même rôle dans la Comédie sociale généralisée. Elle relève les manches, elle n’attend rien. Elle plie mais ne rompt pas.

Et elle marche. Elle s’arrête puis repart.

Elle tient, elle tiendra bon.

Garrido-Corbiere : une calomnie très au Point.

Lorsque les médias moutonniers avaient propagé – sans le temps de la vérification – la nouvelle de la pseudo-arrestation de Dupond Ligonnès à Glasgow, suivant aveuglément en cela la fierté de notre police d’investigation, on pouvait encore en rire. Un peu moins cependant lorsque – bis repetita –  une journaliste de France Inter et nombre de ses confrères se faisaient les porte-paroles de Castaner dans l’épisode de La Salpêtrière, proférant sans attendre un lot inimaginable d’insultes contre les gilets jaunes.

Avec l’énorme affaire du Point et de son journaliste Aziz Zemouri, nous avons quitté la préhistoire pour entrer de plein pied dans l’ère institutionnalisée de la calomnie.

*****

Quid de ce tremblement de terre ? Des effets durables, inexorables, inoubliables ? Hélas non, car, une fois ce week-end passé, toutes ces secousses médiatiques seront neutralisées. Ce sera le retour au calme plat dès la semaine prochaine : comme souvent, c’est cette inertie qui constituera alors la plus grande des censures. Ce n’est donc pas encore demain qu’on jettera aux oubliettes les neufs milliardaires des Medias et leurs sous-fiffres rédactionnels.

Je me dépêcherai donc d’écrire ce petit billet pour que quelque chose reste dans ce laps de temps et accroche quelques lecteurs et lectrices du blog. La bataille Garrido-Corbière tombera dans l’oubli, elle sera perdue (mais pas la guerre, hein ?). A l’Oubli, s’ajoutera l’autorégulation des médias dominants qui savent introduire dans leur discours ce qui les nie et ce qui les met en cause. C’est que le Capital réussit quasiment toujours à boucher les interstices, à parfumer en Chanel les égoûts les plus nauséabonds. Ce n’est evidemment pas une raison pour que je n’y ajoute pas mon grain de sel, que je ne tire pas une flèche de BiBi.

Faire le Poing.

Jusqu’à aujourd’hui, on avait une frange du lectorat du Point qu’on pouvait classer en cadres-de-leur-temps qui avaient su discipliner un fascisme libéral en libéralisme bon enfant. Pinault chiraquien était finalement un bon bougre qui aimait les pommes et Bernadette. Mais depuis la poussée d’une Marine Le Pen dédiabolisée, les lecteurs-récepteurs lambda du canard-laquais sont prêts à tout avaler.

Cet assujetissement d’un lectorat en rut consommatoire de scandales, cette flopée de lecteurs gloutons ruminant leur passage au RN sans problème, cette ingurgitation de normes fascistoïdes ne seraient guère possibles sans le concours et la solidarité des rédactions amies et concurrentes. Evacuons vite fait le contresens de « Journalistes, tous pourris » et levons nos verres aux précaires, aux derniers va-nu-pieds de la presse, à cette infime minorité qui se bat – vaille que vaille.

Non, ceux mis en cause sont cette cinquantaine de pisse-copies en col blanc, ces sommités de papier hygiéniques, ces crevards en écran 16/9 et ces modérateurs-animateurs du type Grandes Gueules.

Unanimité hiérarchique.

J’ai remarqué que, jusque dans cette fange médiatique il y a encore une hiérarchie. Le premier de tous ces menteurs repérés sur les réseaux sociaux fut un certain Paul Denton qui court après un poste de grand média (53000 abonnés Twitter. Pas rien). Ce fut lui qui donna le coup d’envoi de la ruée (dans le mensonge) et sonna le début de la chasse du jour. Dans son tweet, remarquons qu’il n’y a ni conditionnel, ni guillemets, ni vérification, ni attente pour exposer les « faits ». Son habitus anti-Gauche qui explose illico après la parution de l’article, fait déjà corps avec le mensonge du Point.

Le second, Eric Revel, ex-journaliste du Parisien-TF1, invité des chaînes et radios de la honte (ce matin encore à Sud-Radio).

Bien entendu, ne sont pas en reste nos grands intellectuels de droite, pignoufs colorés et mâtinés de couleur brune. Oh ils ne se sont pas donnés le mot, ils ne se sont pas téléphoné : nul besoin. La haine des Insoumis et de la NUPES leur a suffi pour jeter leurs tweets orduriers à vitesse supersonique. Ils le tenaient enfin leur os à ronger ! Ils ne l’ont pas lâché, ils s’y vautreront même avec un enthousiasme incroyable. Le Climax. L’Extase. Deux jours. Le temps de faire jaillir les eaux de la Vérité. Le temps de supprimer leurs tweets.

Inventaire du haut-du-panier.

Raphaël Enthoven, Caroline Fourest de LCI (La Chaîne Immonde), Claude Weill (Lobs). Une chose frappe dans ce concert unanime, c’est la hargne, l’insulte, l’acquiescement sans limite si semblables aux insanités proférées par les tweetos fascistes. Ce sont désormais des tunnels à ciel ouvert, des autoroutes de l’obscénité qui relient les uns aux autres.

A un tweeto qui tentait de minorer l’avis de ce nullard d’Eric Naulleau et tentait de me mettre de son côté, je lui rajoutais cet autre tweet de calomnie :

***

La presse économique, elle aussi, ne voulait pas rester en queue de peloton. Dans l’enthousiasme, nous avons Emmanuelle Ducros de L’Opinion (voir capture plus haute). Allons plus avant : voila Géraldine Woesner du… Point, Marion Van Rentherghem de L’Express et Eugénie Bastié du Figaro/ CNews. Cette dernière avouera avoir fait « confiance » au Point, ayant trouvé de tout temps que cette feuille de chou d’extrême-droite avait été « une source fiable ». Ah cécité idéologique, quand tu nous tiens !

Les excuses.

D’abord celle (défense de rire) de la directrice du Point, excuses faisant suite à celle d’Etienne Gernelle. Géraldine Woesner est ainsi présentée (Linkedin) : « Géraldine est une journaliste de talent, déterminée et organisée. Elle possède un excellent sens du contact. Elle a également un très bon carnet d’adresses ». Une responsable au plus haut… point écrit sans ciller que l’article paru dans son hebdo – avec son aval – est… « ahurissant » !

Mais le tweet qui résume bien cette pauvre stratégie des « excuses » c’est celle avancée par Benjamin Sire, journaliste à Franc-Tireur, qui nous délivre un tweet de haute volée. Ce seront quatre lignes aux magnifiques éléments de langage qui – à peu de choses près – sont les mêmes que ceux de la journaille de la presse des milliardaires. Des « excuses » via lesquelles il tente d’enfumer l’opinion. Bascule finale de ce chien de garde : il nous faudrait… « louer » le courage de ses collègues… Nous pouvons donc vomir.

***

Je laisserai le dernier mot à une de mes abonnéee Twitter qui dit l’essentiel à Géraldine Woesner, journaliste en chef du Point, « pigiste » quotidienne chez ce mollusque de Pujadas.