Category Archives: Photos, peinture & cinoche

Une Vie de Chien, un Art à quatre pattes.

Censure sur une vie de chien.

Il y a longtemps que BiBi n’avait eu vent d’un scénario aussi ahurissant, d’un acte de censure aussi incroyable. En lecture sur le site du Nouvel Observateur, voilà sur quelle affaire il tomba. A la Foire Internationale d’Art Contemporain de Paris, ce vendredi 24 octobre après-midi, le Groupe Recherche et Investigation du Commissariat du huitième arrondissement de Paris est intervenu sur le stand où étaient exposées les œuvres photographiques d’Oleg Kulik. Les policiers ont saisi les œuvres « litigieuses » pour les photographier et les ont ensuite remises au commissaire de la FIAC. Cette opération a nécessité cinq agents en civil qui ont été rejoints ensuite par quatre hommes en uniforme. Gilles D., un galeriste qui visitait la FIAC a assisté à l’intervention : « Les policiers étaient en train de fermer le stand (…) et de pousser tout le monde dehors ».

BiBi ne connait pas les œuvres de Kulik. Il s’est juste promené sur les sites qui offrent les quelques photos de l’artiste russe. Des photos de nus, des montages bruts de décoffrage, des rapprochements Homme-Animal souvent saisissants. 

BiBi a trouvé que dans les interviews et la gamelle d’Oleg Kulik, il y avait à boire et à manger : « Je considère ma naissance comme une performance amusante. Ma mère est arrivée à la maternité quand Gagarine est arrivé dans l’espace. Les gens de l’hôpital criaient : « l’homme est dans l’espace ! ». D’autres disaient selon l’expérience précédente : « Ce n’est pas l’homme qui est dans l’espace, c’est le chien ». Ma mère entendait donc ces voix : « L’homme, le chien dans l’espace ». Et c’est ainsi que lui apparut cette évidence : l’Homme est un Chien.
BiBi, lui, ne veut pas d’un Art à quatre pattes, ne veut pas non plus qu’Oleg Kulik se retrouve au chenil. Puisse son travail continuer pourtant de nous montrer les crocs. 
Sans laisse, ici ou ailleurs, en toute liberté.

Les jolis bras blancs d’Agnès Jaoui.

Jaoui Bacri et Debouze dans la charette

«A PROPOS DU FILM : PARLEZ-MOI DE LA PLUIE» d’Agnès JAOUI.

Jaoui, Bacri et Debouze s’en vont faire leur film-documentaire. Ils grimpent les Alpilles en ronchonnant, contournent les fourrés, évitent les épineux. Bacri insiste pour persuader les deux autres qu’il y a là-haut, « un endroit d’où l’on peut voir toute la France ». BiBi s’interroge alors dans son fauteuil et sort de son ennui : « Existe-t-il un point de vue d’où l’on peut tout voir ? ».

BiBi se dit que ça part mal cette histoire de pré-voyance. Et en effet, ça s’arrête en chemin. Le trio se pose un peu là, pas forcément où le Désir commande. BiBi se dit qu’il va y avoir un moment de vérité qui va donner toute sa grandeur à ce petit film. Et voilà que derrière ce trio, par dizaines, viennent bêler des moutons. A ce moment du film, ils ne sont pas invités, ils s’invitent. A une autre époque, Charles De Gaulle vociférait que « Les Français étaient des veaux », voilà que le troupeau avait changé : les Français seraient-ils devenus des moutons ?

BiBi se dit qu’il a mal compris, que le trio Agnès Jaoui-Jean-Pierre Bacri-Jamel Debouze ne peut pas penser ça. Ils ont dû lire «La Misère du Monde» de Bourdieu avant de se lancer dans cette aventure. Ils ont sûrement compris qu’on pouvait très bien montrer et analyser, jouir et être Jaoui, crier et être Bacri en même temps.

Et puis vient la scène des deux pèquenots du Lubéron. BiBi se souvient que dans «Les Bronzés», il y avait une scène similaire, très réussie, avec les bouseux qui sortaient un alcool bien de chez eux et qui l’offraient à des Parigots-têtes-de-veaux. BiBi s’en souvient de cette séquence, tordu de rire qu’il était devant Michel Blanc et Josiane Balasko (et leur tord-boyau) irrésistibles. Mais jeunesse se passe.

BiBi a vingt ans de plus et il regarde Jaoui-Bacri-Debouze autour de la table. Que va-t-il voir ? Deux moutons haineux (pas laineux). Lorsque le premier des deux bouseux crie sa hargne contre Bruxelles, BiBi sent venir le cliché « Front national ». Et en effet, ça ne rate pas : Jaoui répond que «quand-même, faut pas exagérer, y a des subventions». Rien à dire, c’est politiquement très très correct. Plus loin, le même bouseux pousse un peu et décrit assez justement son réel : «Je travaille 15 heures par jour, je suis de plus en plus pauvre, je crèverai la gueule ouverte… »

Et c’est ici, c’est ici, hélas, que Jaoui gomme toute la complexité du Monde et étouffe toute la richesse possible de ce personnage… auquel elle ne va donner aucune chance. Là, Jaoui aurait pu faire un cinéma qui cherche, qui prospecte, soulève les contradictions, de celles qui font que les Damnés de cette terre provençale participent hélas à leur propre domination. Ou encore filmer quelque chose d’approchant qui dit cela… Mais non : Jaoui squizze ce paysan tendance FN qui pourrait dire des choses intéressantes sur sa condition. Mieux même : pour se venger, Jaoui fait intervenir le second mouton, obsédé sexuel, deuxième bouc émissaire. Pourtant ce Paysan préhistorique va dire une des répliques les plus poétiques du film. Yeux rivés sur Agnès Jaoui, il lui lance : «Vous avez de jolis bras blancs».

Et c’est juste avant que ne parle la pluie… que le film prend l’eau. Il prend eau de toutes côtés à partir de la réaction de Jaoui qui prend son chandail, s’en couvre les bras et le resserre sur ses épaules.

Jaoui s’est « couverte » et à cet instant-là, elle rate le coche, elle rate l’avion, elle rate son film qui ne décollera plus, toute à son incapacité à voir autrement ces bouseux. Pour elle, ce ne seront que deux moutons haineux, deux boucs en rut devant elle.

Jaoui ne voit pas que c’est dans ses bras couverts que réside  l’humiliation ordinaire qu’elle dénonce par ailleurs – via le couplet plus noble de Debouze sur le tutoiement du pharmacien à sa mère. Dur évidemment de filmer des personnages qui résistent au Stéréotype : ils peuvent se venger.
BiBi trouve que c’est dans ce geste de tirer la couverture à soi (aux préjugés de sa couche sociale) que le film devient frileux et sent le renfermé. Une fois ces paysans hors-champ, chacun peut se bercer de douces illusions sur ses petits bonheurs, sur ses petits malheurs. La Pluie – comme dirait une jeune hippie dans le film Woodstock – lave de tout. Dans le film de Jaoui, cette pluie, filmée de façon catastrophique, effacera tout : le personnage de Jaoui retrouvera sa passion politique et son homme, Djamel sa femme qu’il a failli tr(e)omper, Jean-Pierre Bacri rejoindra son fils qui aime son papa sous le parapluie d’une jolie rouquine et Mimouna partira vivre chez sa sœur bien-aimée, à distance de son méchant mari.

Pourtant, Dieu – et BiBi avec – sait que le mouton disait vrai : Agnès a de bien jolis bras blancs.

Trois photos et une Lettre.

Trois photos et une Lettre

BiBi ne voulait pas atteindre son Centième article – depuis ce 22 mars où il se mit en mouvement – sans honorer le cinéaste iranien Abbas Kiarostami ( en persan : عباس کیارستمی ). Ses films enchanteurs, graves, passionnants accompagnent et continuent de nourrir BiBi. Du Goût de la Cerise à Où est la Maison de mon Ami en passant par le Vent nous emportera, Bibi expose trois photographies de ses films.

La lettre, elle, sera postée peut-être plus tard.

Deux films au secours de BiBi.

Maman j’ai raté le Kung-Fu

BiBi se sert du Cinéma dans son travail éducatif. Il se souvient récemment d’avoir eu à faire du joint entre les enfants/adolescents dont il s’occupe et les histoires que le hasard cinématographique lui a fait rencontrer.

La première de ces rencontres fortuites fut ce film regardé en DVD avec Julien, un marmot de 12 ans, toujours en demande insatiable, toujours en besoin de lait maternel pour combler vide, trous d’amour et trous d’air. A la rescousse de BiBi, il y eut cette magnifique entame tombant à propos de ce film  » Maman, j’ai raté l’avion » où le petit héros, propriétaire provisoire de la carte bleue de son père, ratant l’avion que toute la famille a pris, va pouvoir réaliser tous ses rêves. Il s’en va dans la plus belle des villes (New-York), va viser le plus bel Hôtel ( le Marriott), réservera la plus belle chambre de ce plus bel hôtel, commandera le plus merveilleux des repas, la plus énorme glace devant la plus belle des télévisions, tout ça dans le lit le plus douillet au Monde. Tout cela durera quelques jours et, dis-moi, Julien, que crois-tu qu’il arrivât à notre petit héros ? »

www.back-to-intro.com

Plein le dos ?  http://www.back-to-intro.com

Sitôt regardées, les photographies de P. sont immédiatement reconnaissables. Les unes font lien avec les autres et dans le même temps, chacune a sa singularité. C’est la marque d’un style. Pas d’un style publicitaire. D’un style qui ouvre sur la vie d’aujourd’hui, sur la vie actuelle et non sur l’actualité.