1. BiBi a vécu jusqu’à l’âge de douze ans au Maroc, à Ouezzane, en plein milieu des montagnes du Rif. Somnolent à 5 heures du matin, il écoutait le muezzin sur la mosquée toute proche. En bas de sa rue, il voyait ses potes d’école filer à l’Eglise new-look, aux voûtes modernes, style Années 60. Dans le souk, il y avait le petit quartier juif où BiBi se rendait souvent. Là, il trouvait la plus vieille synagogue du Maroc. En classe, parmi une soixantaine d’élèves il côtoyait juifs marocains, catholiques français et espagnols, orthodoxes grecs, musulmans. Sans jamais avoir lu la BiBle, (pas d’éducation religieuse pour lui), il vécut en plein et à côté de ce petit monde des trois Monothéismes.
2. Pour BiBi, la grande question n’est pas de dire si l’on croit ou non en Dieu (et ainsi partir de l’intime, de l’individu) mais d’être assuré que toute la Puissance étatique laissera s’exprimer et préserver toute croyance. A cet égard, la France et ses combats historiques pour la Laïcité sont formidables.
3. Sarkozy a donc ouvert la Question (électoralement payante ?) de l’Islam. Dans la foulée, reviennent au premier plan des colères, des haines… mais elles sont aussi vives curieusement des deux côtés. Voilà que BiBi entend de son côté que la Religion, toutes les religions sont de la merde, que les autorités religieuses ne font que mettre la main dans la culotte des petites filles, que les Religions n’ont amené que des guerres etc. Curieux déchainement.
4. BiBi, en Ministre de l’Enseignement, imposerait des Cours d’Histoire des Religions dans les écoles et collèges publics. Cette connaissance ferait à coup sur baisser ces tensions qui naissent souvent de la méconnaissance : méconnaissance par exemple de l’imbrication très étroite des trois Monothéismes nés, éprouvés sur les terres du Moyen-Orient.
5. Bien entendu, on peut répondre que tout ça, ce sont des bondieuseries et qu’on s’en contrefout mais on se priverait de comprendre – par exemple – ce qui se passe aujourd’hui au Moyen-Orient. On se priverait en outre de la beauté des histoires, des Mythes car ce sont des sacrées histoires que celles d’Abel et Caïn, d’Adam et d’Eve, de Jonas, de Job, d’Abraham. On lirait aussi avec plus d’acuité encore Shakespeare, Kafka et tant d’autres.
6. Aux prêtres irlandais pédophiles, on pourrait opposer cette Annécienne rencontrée par BiBi, fervente catholique, qui fit imprimer en 40-44 quelques 300 cartes d’identité pour des résistants juifs et non-juifs poursuivis par la Gestapo et la Milice. On pourrait rappeler que les Camisards, luttant contre les Dragons, flicaille de Louis XIV, étaient des Fous de Dieu et encore qu’en 39-44, pas un seul parti politique clandestin de Gauche ne sauva un seul enfant juif dans leurs mots d’Ordre et leurs tracts, que beaucoup furent sauvés par des congrégations religieuses et par des Justes catholiques au nom de leur Amour du Prochain.
7. D’autres enseignements peuvent être tirés de la BiBle. Déjà, Georges Brassens, matérialiste en diable, conseillait de lire les Textes sacrés. Textes qui vont au-delà de ce qu’on pense des religions car ils concernent une façon d’être et de penser. Et cela va même jusqu’au choix du métier d’éducateur (celui de BiBi), métier où il faut accompagner enfants et adolescents en souffrance. Qu’on médite sur les interprétations possibles de cette Parole V : «Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent sur la terre que l’Eternel ton Dieu t’accordera». Territoire infini qu’ouvre cet axe de pensée qui serait par exemple de ne pas confondre cet «honore» avec «obéis» ou encore avec «il faut aimer ses parents»…
8. Et pour finir, cette histoire juive, succulente, la plus petite qui soit. Elle tient en trois mots (« Dieu soit loué !») et elle nous emmène dans tous les sens. Celui, manifeste, du Juif pingre, moqué par ses coreligionnaires (il veut louer Dieu pour ne pas trop dépenser d’un coup) et celui, latent où – belle idée – on ne pourrait être que locataire de Dieu mais jamais en être le propriétaire !