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« Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés »

Qui aurait pu imaginer à quel point le libéralisme entrerait dans ce qu’on appelle l’intimité, la nôtre, celle de chacun, de chacune ? C’est la marque des temps présents : nul n’échappe à cette violence et nul ne peut ignorer à quel point cette violence du libéralisme (excusez le pléonasme) abîme, a abîmé et continue d’abîmer nos corps. Faim, fatigue, usure, dépressions, pleurs, refuges impossibles et misère : c’est cela notre lot. Lent travail, tentative de destruction silencieuse, tûe, souterraine.

Tous en sont frappés (1).

Jusqu’à présent, peu de gestes et de postures de défense. Rien n’y fait. A plus ou moins grande échelle, tous en sont touchés. Pauvres défenses : ce n’est pas en courbant l’échine, en faisant « comme si on allait retrouver le temps d’avant », en déniant, en se conformant aux injonctions ou en fuyant dans l’Utopie écolologique qu’on y échappera.

Enfants à la dérive.

Tous en sont frappés. Il suffit de voir comment dans le devenir enfantin, la Reconnaissance est perturbée. Nous avons, à l’orée de cette Catastrophe menée de mains de Maîtres, les enfants masqués qui n’ont plus idée de ce qu’est le visage. L’enfant est déjà le Défiguré d’aujourd’hui, le Terrorisé (ou terroriste) de demain. On n’a déjà plus le souvenir de ce qu’est la «moue enfantine», on a oublié nos grimaces, on ne sait si on continuera de parler de ses jolies joues roses et de ses mimiques adorables de nouveau-né.

Corps récalcitrants et vagues de Confusion.

Qui aurait pu penser – malgré les corps récalcitrants qui défilent tous les samedis en plein mois d’août – à quelle profondeur Mort et Destruction plongeraient en nous ? Pressions, compressions, prurits, boursouflures, cicatrices non cicatrisées, exémas étalés sur toutes nos pensées, saignées et pertes : tous sont le résultat du déchaînement des forces policières, des intimidations démultipliées, des chantages à répétition, des temps du mépris en continu, d’interventions quotidiennes de Propagandistes Médiatiques (autant privés que publics). Et qu’on ne vienne pas se (me) la raconter : c’est tout le tissu du corps social qui est écrasé.

Couplet : C’est tout le tissu du corps social qui est écrasé.

On a cru que les forces contraires – dites de Résistance – endigueraient la vague, qu’elles feraient front et barrage mais le Réel est venu nous rappeler non notre impuissance mais notre désarroi. Désarroi en grande partie lié à notre impossibilité d’analyse de ce qui est, de ce qui se passe, de ce qui passe.

La Vague de la Confusion emporte tout : elle est l’arme essentielle dégainée pour n’importe quoi. Elle envahit les écrans, elle squatte les micros, elle promeut les Tarés de l’Information, elle exhibe les Larbins de la Honte (une cinquantaine tout au plus qui tournent en boucle) et leurs Débatteurs-Experts-impolis Politologues des Instituts tut tut et de Sciences Popo.

Tous frappés ? Non, certain(e)s plus que d’autres.

1. Des violences subies, il faudrait parler en priorité de ceux, de celles qui en ont été atteints, de ces corps des travailleurs eux-mêmes baillonnés, forcés de se masquer pour nous faire croire que – question production – nous serions tous pareils, nous serions une masse indifférenciée (donc égalitaire), masse lancée à vitesse incontrôlable sur une même échelle, tous plongés dans le même bain. Dans ces psaumes pseudo-égalitaires qui ne nous consolent de rien, dans cette Invention fictionnelle permanente à vomir, il y a le tri caché de ce que sont les gouffres d’inégalités sociales. Pour ces Puissants lancés sur ces routes libérales, les bas-côtés n’existent pas. Tous pareils, y compris le 0,01% qui tient la barre.

2. Oui, il faudrait parler de ces précaires harassés, de ces chômeurs prêts au suicide, déjà morts socialement, vieux et nouveaux jetés en pâture à la férocité et à l’avidité de cette Gentry pourtant connue, celle des Tenants accrochés à la propriété privée des grands moyens de production et d’échange (avec aide directe de l’Etat).

Ravalés aux déchets civilisationnels, voilà que s’entassent les Nouveaux errants sédentaires, aphasiques (aux portes des Restos du Coeur) et les Arrivants de la Guerre, du Terrorisme et de la Misère. Ils/elles sont ignorés, méprisés, hébétés, pourchassés, tabassés comme jamais dans le plus grand des silences (Rappels : on a interdit aux journalistes de s’approcher de toute Operation Nettoyage, on applaudit Frontex, on crée les nouveaux métiers de Contrôle et de Surveillance en CDI svp etc).

3. Oui, il faudrait parler des vieux, des vieilles, des vieillards, âgés bien avant l’âge (mais on ne dira plus «avant l’âge» car de l’âge, il sera désormais fixé à 65 ans avant descente au caveau, avant terre retournée faute de pierre tombale respectable. Oui il faudrait parler de leurs yeux fatigués (d’une fatigue inconnue), de leurs nouvelles démences, de leurs paralysies inexplicables, de leurs pensées en cendres d’où toute transmission est désormais impossible.

Refrain : Qui aurait pu imaginer ?

Qui aurait pu imaginer à quel point le libéralisme entrerait dans ce qu’on appelle l’intimité, la nôtre, celle de chacun, de chacune ?

Sportifs insultés.

Hier encore, les représentants mêmes du Corps sportif, croyant encore aux éloges élyséenes sont restés tétanisés devant les Paroles du Commandant en Chef. Eux, elles, si habitué(e)s à la souplesse, à l’endurance, à la concentration, hommes, femmes paraolympiques ou non, ils n’ont pas bougé, cédant à la Discipline disciplinaire devant les Matons de la Pensée.

Intellectuels frigorifiés.

Que dire aussi de ces Intellectuel(le)s frigorifié(e)s en plein cœur de l’été. Muets et mutiques causant comme si de rien n’était. Prochain disque. Ils dansent dessus. Houla Hop. Prochaine tournée. Prochain tournage. Ressuscités in-extremis. Houla Hop. Si effrayés d’avoir côtoyé les bas-fonds. Intellectuels (médiatiques le plus souvent) pour qui René Char bravant les Chemises-Brunes-d’Oradour-Sur-Glane c’est de l’Ignorance ou – au mieux – de l’Histoire préhistorique.

Ce Libéralisme-là a tout nivelé, tout aplani. Le discours critique est certes étouffé mais le désir d’un tel discours existe t-il vraiment encore ? A peine s’avancerait-il que l’Armada sort les crocs. De Liberation au Monde, de Marianne à Valeurs. Des Informés aux espaces dominicaux du JDD. De LeMaire à Bertrand. D’Hidalgo à Roussel. Tous s’allongent. Tous se retrouvent débattant à la Fête de l’Humanité. (« Alors, Gabriel Attal, que pensez-vous de la Réformes des Retraites » ?). Tous blablatent sur la Rentrée Littéraire, sur les exploits du PSG, sur la nécessaire efficacité de notre Police, sur Koh-Lanta déplacé le mardi (la semaine sera moins longue) et sur les dépôts de tweets sur nos écrans.

Refrain dernier.

Qui aurait pu imaginer à quel point le libéralisme entrerait dans ce qu’on appelle l’intimité, la nôtre, celle de chacun, de chacune ? Qui dira à quel point le libéralisme nous abîme et nous tue à petits feux ?

*

(1) « Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés (…)
Nul mets n’excitait leur envie ;
Ni Loups ni Renards n’épiaient
La douce et l’innocente proie.
Les Tourterelles se fuyaient :
Plus d’amour, partant plus de joie ».
(La Fontaine)

Ils ont choisi la défaite 2022.

Ils ? Qui ça, « ils » ? Pas de tergiversations : il s’agit du Bon Bourgeois du Bloc Bourgeois, (B.B.B.B) de ce «socialiste moderne» comme l’écrit ironiquement Frédéric Lordon, dans son dernier billet.

Comment reconnaître un B.B.B.B.?

«Depuis quarante ans, on lui a répété, envers et contre toute évidence, que le parti socialiste était «de gauche». C’est en ce point qu’on mesure la difficulté de défaire les investissements imaginaires dans une identité politique. Une fois qu’on s’est dit de gauche à la manière PS, et qu’on y a été confirmé répétitivement par France Inter, ni les traités européens successifs, ni les privatisations, ni le CICE, ni les démolitions du code du travail, ni finalement aucun des alignements sur les desiderata du capital ne peuvent conduire à quelque reprise de soi politique : on est de gauche, c’est évident».  Frédéric Lordon.

Il est des nôtres ? Repérages.

Ce Bourgeois, nous le connaissons tous, mais trop souvent, nous faisons comme s’il n’avait guère d’importance et de responsabilité dans le désastre présent. Nous haussons les épaules, nous laissons courir, nous le laissons discourir. Il est une de nos bonnes connaissances, un type bien qui est régulièrement présent aux réunions des Parents d’élèves, un type honorable qui dit que Blanquer est insupportable mais qu’il verrait bien Luc Ferry à sa place «à tout prendre, hein ?», il fait ses courses à la supérette, sa femme est au Club de Marche, ils ont la soixantaine approchante. Lui, il avoue que Michel Onfray a dit de jolies choses dont «la Gauche devrait s’inspirer», il dit encore qu’au réveillon du Jour de l’An, il espère manger au restaurant car l’histoire du Covid («tous vaccinés, on y arrivera») sera bientôt du passé. («Tous comptes faits, Macron a bien mené son affaire»)

Quand on lui demande si le confinement a eu des effets négatifs. « Non financièrement nos fins de mois ont été assurées. C’est surprenant mais rien de changé. Pour nous, c’est comme avant».

Ne pas effacer l’historique (de son habitus politique).

En 1981, notre B.B.B.B sautait dans la fontaine des Cordeliers à Lyon pour fêter l’ère Mitterrand. Il a conservé la Une du Libération tout rose d’alors. Qu’en 1983, Mitterrand ait finalement mis à jour ce qu’il avait caché en manoeuvrant habilement. «Je clame Vive le Programme Commun» mais je  fonce dans le libéralisme-façon-Bernard-Tapie » ne lui a jamais posé problème. Nous étions en pleine fascination des Nineties. Les entreprises étaient au Top, le miel de l’argent coulait à flots, le CAC 40 montait, les petites économies placées en bourse lui avaient fait gagner 2%. Même Chirac et ses pommes, Bernadette et ses pièces jaunes, c’était sympa. Sa conscience politique aiguë lui disait que la Cohabitation (on ne disait pas «Collaboration») c’était finalement une bascule nécessaire dans «L’Epoque Moderne». Il était toujours de Gauche bien sûr car cette dernière s’était modernisée, il continuait à soutenir le combat avec les Valls, Elkhomry, le futur Macron, Montebourg, Batho et Taubira. Plus de danger avec les Communistes car le Parti de Robert Hue et de Pierre Laurent s’était modernisé, lui aussi, dans le bon sens. C’est sûr : on allait rester la 5ème puissance mondiale comme tous les économistes l’écrivaient. Là-dessus, aucun doute puisque Terra Nova lui envoyait régulièrement ses analyses impeccables. Et il rajoutait : « A l’Institut Montaigne aussi, les études sont vraiment très sérieuses« .

Et puis, reste le souvenir d’avril 2002.

Un Jospin à la dérive et un Le Pen au second tour. « Hein ? Quoi ? Catastrophe ! Les gueux sont entrés dans la Ville. Dieu du Ciel, des français manipulés, inconscients, enfoirés sont venus foutre la merde ! Ah l’esprit français, parlez moi z-en ! On a le pire de l’Esprit français, jamais content, rouspéteur. L’esprit de 1940. Populo avachi ». La forme contestataire – via les taux d’abstention majoritaire qui vont suivre – sont ignorés. Et le Non au Référendum 2005 sera, lui aussi, vite dénié, vite refoulé, vite contourné politiquement.

Va t-il « se défaire de ses investissements imaginaires ? » (Lordon)

Si l’on était en cours avec Bourdieu, on dirait : «habitus incorporé». Si l’on a souvenance de certains écrits d’Althusser, on retiendra ceci :

« Pour passer sur les positions de classe prolétarienne, l’instinct de classe a seulement besoin d’être éduqué. En revanche, l’instinct de classe des petits bourgeois et donc des intellectuels doit être révolutionné ». Pas pour demain cette Révolution.

Pour notre B.B.B.B et les Droites, le Mal, c’est le même.

Les déclassés, les antivax, les dans-la-rue-chaque-semaine, les islamo-gauchistes, les gilets-jaunes-trop-jaunes, voilà le Mal. Oh, le B.B.B.B garde encore un restant d’humanisme («Il faut les aider et rester quand-même bienveillant. C’est qu’on est quand-même en République ») mais c’est pour rajouter «Mais hélas, il faut bien le dire, ils sont «bêtes», « abrutis », «irrécupérables» ou encore «Oui, il faut travailler plus, que voulez-vous, c’est la mondialisation. Le monde a changé». Pire encore : «Filous et profiteurs, oui quand-même, c’est un peu vrai et, avouons-le, ils sont quelque peu antisémites. J’ai vu une pancarte à la télé (il hausse le ton) « c’est in-to-lé-ra-ble »).

Chaque matin, le B.B.B.B écoute «France Inter».

Mais pas uniquement. Il sait d’avance qu’il partage les opinions inamovibles de L’Obs, de Liberation (qu’il achète assez régulièrement), du Monde (A son travail, le boss laisse traîner des numéros), de Marianne le Mag (« Super leurs Unes ! »). Madame, elle, s’est réabonnée à Télérama. Hier elle s’est ralliée à l’avis de Fabienne Pascaud, l’éditorialiste qui garde de l’espoir pour la Culture avec la nomination de Roselyne Bachelot.

Le B.B.B.B est un inconditionnel de France Inter. Certes, il n’était pas toujours d’accord avec Bernard Guetta mais «Thomas Legrand et Dominique Seux qui l’ont remplacé disent de belles choses». Il ignore évidemment ce qu’avait relevé Fakir dans un ancien numéro…

Liberation et Politiquemedia.

Et, hier, il est tombé sur cet article de Liberation qui a commandé et approuvé le travail de cet Officine (PolitiqueMedia probablement très influente) sur lequel il faut s’arrêter. Un article qui dit tout du Choix de la Défaite sous des dehors neutres, objectifs.

Un de mes tweets a suffi à repérer l’esbrouffe, c’est-à-dire les catégorisations acceptées et imposées par le quotidien favori de «gauche» de notre B.B.B.B. Des catégorisations d’évidence of course.

Notre Bourgeois gentilhomme se dit toujours de gauche.

Il est persuadé que sa version Droite-Gauche existe toujours. «En 2017, c’est vrai, il fallait bien s’y résoudre : entre le totalitarisme et Macron, y avait pas à hésiter». Et notre B.B.B.B n’a pas hésité. D’ailleurs, il n’hésite jamais. Il n’hésite pas car – contrairement aux gens de l’Ultra-Extrême-Gauche (un concept trouvé à Liberation et psalmodié par les Fabienne Sintès, Demorand, Salame, Duvic, Dely, Achilli and Co) – ,lui il a réfléchi, il a pris en compte les bouleversements mondiaux, les Chinois, les pays émergents, les Talibans, Bachar, Bolsonaro, Poutine et ses pipe-lines mais aussi les scandaleux paradis fiscaux et les méfaits du «Grand Capital» (il rit en disant ces deux mots façon Georges Marchais). Et donc, y a pas à hésiter. Il sait que la Droite (LR, RN) continue à être très vilaine. Ses opinions se fondent exclusivement dans son horreur du populisme. Horreur de la droite dure. De l’extrême-droite, de tous ces abrutis qu’on manipule. Mais, point nodal tout aussi incontournable : pour lui, Macron, ce n’est ni la Droite, ni des relents d’extrême-droite. «Faudrait pas exagérer, hein ?»

Parfois – mais il évacue vite – il se dit que certains, à droite, n’ont pas tout à fait tort. Il y trouve des gens intelligents qui disent des choses sensées sur l’islamo-gauchisme, sur le migrant, sur les frontières insuffisamment protégées, sur l’Europe (qui s’affaiblit à cause des râleurs), sur les banlieuesAh oui, les banlieues») et les jeunes qui traînent dans les rues à point d’heure. Mais de la violence symbolique et réelle de la police castanerienne et darminesque, il ne voit rien. Il anônne toujours «je suis de gauche». Des preuves ? Il est révulsé par les millions que va gagner Messi, par les viols, par Darmanin et les femmes («Je verrais bien un retour de Cazeneuve, il était bien»), il maudit le Texas qui a interdit d’avorter, il se désole du Climat et de la dégradation de notre environnement («Perso, j’ai appris à fermer les robinets »). Il est plus-que-jamais pour la solidarité («j’amène mes vieux habits à Emmaüs»).

L’Esprit de Communauté comme pilier.

Mais ces positions-là (acceptons-les) ne le feraient pas tenir debout longtemps si elles n’étaient que personnelles. Si son for intérieur reste indestructible et inébranlable dans ses fondations imaginaires, c’est qu’il peut compter à tout moment sur l’Esprit de Communauté. Une Communauté qui existe car elle écoute – comme lui – France Inter et France Info, elle lit Le Monde, L’Obs, Marianne etc. Il s’offusquerait si on lui disait que sa Communauté n’est Une et n’existe que parce qu’elle pointe les boucs emissaires, qu’elle ne tient debout que grace à ces rejets, qu’elle applaudit fièrement Lallement etc. Un Esprit de Communauté dont les piliers inavoués, refoulés, non-dits sont : la Peur animale de Vivre tous ensemble, l’horreur du Conflit, la Haine de Ceux-Qui-Résistent. Et ceux qui résistent et dont notre B.B.B.B ne veut pas appartiennent à l’extrême. Enfin à «l’extrême-gauche» catégorisé ainsi par Liberation.

Cette Propagande-Médias rassure notre BBBB. Elle lui dit : «En bon Français qui votera en mai 2022, la bonne Communauté nationale que tu souhaites ne peut pas se soumettre à un extrême, être dirigé par lui, hein ?» Comment s’étonner dès lors que notre B.B.B.B reste indécrottablement accroché à sa propre vision du Monde : «Oui, oui, oui : je suis toujours à gauche».

Ils ont choisi la défaite 2022.

De cette gauche présente à 4% dans les micros des radios publiques, nos BBBB n’en veulent pas. Mélenchon est leur homme à abattre. Je les vois tous fiers de l’avoir écarté en mai prochain. Ce qui change chez nos B.B.B.B, pour aujourd’hui et pour demain, c’est qu’ils disent désormais ouvertement vers qui, vers quoi, prioritairement, ils écument de rage.

Et pendant tout ce temps, l’ouragan version MEDEF continuera de tout détruire. Et foin de «défaite», nos B.B.B.B se consoleront avec une promotion ministérielle post-2022 (un Enthoven, un Finkielkraut, un Ferry, une Pécresse, un Barnier augmentés de quelques crétins de la Société Civile). Soupçon de culpabilité vite réprimé, j’entends déjà le B.B.B.B d’â côté me dire : «Bah ! Il fallait bien en passer par là». Et puis, dans une accolade : «Dis-moi, tu as écouté la Matinale de France Inter sans Léa Salame? Quand-même bien… non ? »

Sel de la vie et poison macroniste.

Le pass sanitaire n’est pas là pour nous protéger. La vaccination ? Ceux-contre et ceux-pour devraient arrêter de s’écharper et de s’insulter car toute la stratégie de la Macronie (tension et division) se construit là-dessus. Tout débat autour de la nécessité ou non du vaccin est escamoté, toute tentative d’explication pluraliste est exclue. Une chose demeure certaine : le principe de l’inégalité entre citoyen(ne)s est – pour la première fois dans notre Histoire – inscrit dans la loi.

LE SEL DE LA VIE.

J’ouvre le petit livre de Françoise Héritier (paru en février 2012) et je tombe sur son subtil prologue :

« Il y a une forme de légèreté et de grâce dans le simple fait d’exister, au-delà des occupations, au-delà des sentiments forts, au-delà des engagements politiques et de tous ordres, et c’est uniquement de cela que j’ai voulu rendre compte. De ce petit plus qui nous est donné à tous : le sel de la vie ».

Suivront plusieurs beaux chapitres pour dire ce qu’il en fut de son sel de la vie, le tout en associations d’idées et en laisser-venir à soi à la façon des Surréalistes : accumulation de petits plaisirs, de petits désagréments, de miracles intimes, de frémissements (café au soleil, la promenade le nez en l’air, aller à la découverte d’une ville inconnue) etc.

LES POISONS DE LA VIE.

Et puis, tout à coup, au détour d’une très jolie page, ma main reste en suspens, mes pensées froncent le sourcil. C’est que ce temps évoqué par Françoise Héritier… n’existe plus. Le café au soleil ? Préhistorique car il n’est plus certain du tout de pouvoir se rendre au Centre Commercial et d’en acheter. La promenade le nez en l’air ? Encore faut-il pouvoir sortir sans crainte et ne tomber ni sur le virus ni sur une charge policière. Découvrir une ville inconnue ? Mais comment s’y rendre sans être constamment contrôlé, inspecté, disséqué ? Impossible aussi de prendre le train, l’autobus. Se rendre à l’étranger ? Comment financer les déplacements en étant privé désormais de salaire ? Etc.

Peu importe que je sois vacciné ou non, cela ne regarde personne. Mais le constat est grave : nous sommes entrés dans l’ère de la rupture du principe d’égalité, dans la destruction du «secret médical» (1) ? Et autant dire que si le sel dans la vie saupoudre encore ma vie (beaucoup beaucoup moins, hein ?), les poisons de la vie sous Macron, eux, sont bien là.

CONFUSION. DIVISION.

Les périodes de confusion ont toujours existé. Elles nous laissent, dans un premier temps, tous un peu groggy, sidérés, presque paralysés. Il en est souvent ainsi devant les coups de force politiques. Mais la seconde étape (celle de l’analyse) nous requinque lorsqu’on peut la développer. Dressons alors le premier constat permanent : l’Elysée et son larbinat nous mentent. Et le premier dans ce hit-parade, c’est le menteur Macron bien entendu.

Mais ne nous contentons pas de ce constat car ce qui demeure, c’est – on ne le souligne pas assez – l’obligation pour le grand patronat et les banques de continuer à maintenir (augmenter) le taux de profit. Pour cela, ils ont besoin de leur personnel politique et de leur agitation prioritairement basée sur la Covid19. Le temps dominant d’aujourd’hui est le temps de l’Economique, il est chargé d’une férocité rarement vue : concurrence et solidarité entre les différents impérialismes avec l’arrivée des pays émergents aux dents longues, violences policières généralisées, main mise sur les médias (privés comme publics), insultes sur tout opposant etc.

Rappel : le combat du Medef (ici via Denis Kessler) est plus que d’actualité. Que veut cet ex-représentant du Medef avec cette déclaration de 2007 ? Enumérons les quelques buts essentiels poursuivis : justifier les licenciements, liquider la protection et la sécurité sociales, se servir du pouvoir politique que le Medef a contribué à installer, instaurer la pénibilité du travail jusqu’à 64 ou 65 ans et faire en sorte qu’il soit impossible de rêver notre vie au-delà de ces âges.

Les mensonges élyséens n’ont aucunement pour fondement les ressorts psychologiques d’un Macron. Un autre candidat 2022 ferait tout aussi bien l’affaire.

Leçons de l’Histoire : RENE BELIN et… OLIVIER VERAN

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, j’ai découvert Olivier Véran en soignant, syndiqué et gréviste… Il y dénonçait le manque de moyens dans les hôpitaux ! Une décennie plus tard, le même est devenu un larbin qui a pignon, écran et micros, sur rue. Le voilà qui nous assène quotidennement la propagande macroniste, insultant les syndicats, les soignants, les grévistes, le supposé dépassement des dépenses publiques etc.

Des Olivier Véran, l’Histoire en a connu régulièrement. Dans les années 30-35, après le coup d’état fasciste de février 34 (qui échoua), le patronat prit conscience qu’il lui fallait absolument élargir sa base de masse. Que croyez-vous qu’il fît ? Hé bien, il alla chercher de vieilles figures syndicales, les remit sur pied, les paya grassement. Ainsi du syndicaliste René Belin que patrons et banquiers firent monter dans la hiérarchie de la CGT jusqu’à être… le n° 2 de Léon Jouhaux !

Leur but d’alors : diviser le mouvement ouvrier des années Front Populaire en inventant des coups d’Etat supposés des communistes-cégétistes unitaires-complotistes. René Belin fit un travail impeccable. Le bonhomme, très bien rénuméré par les caisses patronales, reçut enfin sa récompense en juillet 1940 : il fut le premier Ministre du Travail du Maréchal Pétain. Et quand les banquiers et patrons de Vichy n’eurent plus besoin de lui, ils le virèrent en 1942. Entretemps, ce René Belin eut le temps – via sa Charte du Travail de novembre 1940 – d’interdire les… syndicats (2)

LECON-BIS DE L’HISTOIRE.

Quelques anti- pass sanitaire parlent de dictature, de Macron-Nazi, de retour de Vichy. Ils nomment mal ce régime. Il faut en effet être prudent avec les rapprochements historiques. Que les industriels et banquiers aient ces volontés constantes, celles de la division pour régner, de la promotion de son personnel politique, de la main mise des Médias et de l’utilisation de la violence policière dans les rues et les manifestations, ne suffit pas à qualifier le régime d’aujourd’hui de fasciste. Les acquis démocratiques tiennent (malgré leurs fragilités et leurs remises en cause), l’exercice – même brimé – des partis et mouvements politiques peut se faire, l’élimination du bouc émissaire n’est pas programmé jusqu’au dernier (le migrant, l’étranger n’est pas le juif des années brunes qu’on déporte au final en camps d’extermination).

Mais que la Macronie se trouve en position de défendre son pouvoir avec un autoritarisme jamais vu depuis la Libération, oui. Aucun doute là-dessus. Penser (agir), c’est difficile, c’est exigeant : ne nous trompons surtout pas dans nos mots d’ordre, dans l’écriture de nos pancartes, dans l’exposé de nos positions.

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(1) Rappelons que 1789, période de bascule, permit de se dégager de l’emprise religieuse et d’ériger un espace privé de liberté pour tout(e) citoyen(ne).

(2) J’insisterai ici encore pour vous pousser à la lecture de ce temps historique (Vichy 1940-1941) via la fiction de Madani Alioua («La Guerre N’Oublie Personne»). Chez L’Harmattan.

« CONTRE L’ETAT PRESENT S’INSURGER »

C’est par la lecture d’un de ses fragments qu’Héraclite, philosophe grec de la fin du VIème siècle avant JC, m’a redonné du courage. En cette période de détresse, de manipulations tous azimuts, d’aggravation de la misère, de mensonges sur la conduite sanitaire, il est impératif de tenter de devenir un humble gardien des vivants et des morts. Pour ça, essayons déjà de voir clair sur l’état présent.

MELENCHON

Ce tweet de Jean-Luc Mélenchon m’a laissé sur ma faim.
On pourrait penser effectivement que Macron se réjouisse que la Justice ait mis Sarkozy sur la touche. Mais peut-on se satisfaire de cette analyse et du trop simple constat d’une mise à l’écart définitive d’un «sérieux rival» ? C’est vrai qu’en cas de candidature, Sarkozy aurait siphonné une partie des voix de Macron (et peut-être l’aurait empêché d’être au second tour). Mais la question essentielle aurait été de savoir si Sarkozy aurait pu être candidat 2022 ?

SARKOZY ET LE LR.

« Mon Chouchou ! Mon pauvre Chouchou ! »

Examinons l’état du Présent : Sarkozy peut, depuis longtemps, mettre définitivement une croix sur un rôle public. L’accumulation de ses casseroles antérieures l’empêchait déjà de simplement imaginer un retour. Cette condamnation lui donne juste le coup de grâce. Les Républicains n’auraient pu le choisir comme candidat et le présenter comme «rival», si «sérieux» aurait-il été, de Macron. Et l’unanimité (de parade) tout autour de l’ex-Président pour prendre sa défense (à l’instar de son président Christian Jacob) ne trompe pas grand-monde. Avec l’énorme et insupportable handicap d’avoir des Républicains passés à En Marche (Darmanin, Le Maire, Philippe), le parti a déjà fait une croix sur cette élection et – coup de kärcher – sur Sarkozy. En le nommant pour 2022, le parti LR aurait pris un sacré risque et ce, pour de longues années. Seul but dorénavant pour ces Républicains : préparer, réfléchir à un candidat pour la future présidentielle 2027 et miser sur un grand nombre de députés.

Quant au républicain Sarkozy, il aura toute latitude pour utiliser ses réseaux afin d’aider Macron (comme il l’a fait en 2017) et de conseiller son double et ami Darmanin. Homme de l’ombre, homme d’influence souterraine, voilà qui satisfera sa vanité de pov’con, voilà la seule place qu’il peut désormais occuper.

ET NOS GRANDS CAPITAINES D’INDUSTRIE ?

Derrière la scène de compassion pour la victime Sarkozy se joue bien autre chose. Pouvons-nous imaginer que les grands capitaines d’industrie (de luxe, d’armement etc), promoteurs de Macron 2017, se soient rangés derrière Sarkozy et qu’ils aient abandonné le banquier amiénois pour 2022? Non. Eux aussi savent depuis longtemps que leur ex-idole ne compte plus. Leur stratégie reste la même : diviser la gauche, isoler Mélenchon par la calomnie et la désinformation quotidienne et promouvoir une pseudo-rivalité Macron-Marine Le Pen (sachant que MLP n’a aucune chance dans un second tour). Pour cela, ils rejoignent la stratégie des agences élyséennes. Voyons un peu ça.

FINI LE « NI DROITE NI GAUCHE » DE 2017.


Les moyens Medias colossaux de 2017 ont permis de fabriquer un dirigeant New Age, beau, sympathique, à qui il fallait faire confiance. Aujourd’hui, Macron est devenu impopulaire et le MEDEF s’en inquiète.

Alors, ne soyons pas surpris, ils vont sortir la grosse artillerie. L’énormité de la Propagande pro-Macron 2017 ne sera qu’une aimable plaisanterie comparée à celle qui s’annonce. De Bouygues TF1 au Service public, des chaînes de la honte au Monde de Niel, tout sera fait pour un Episode 2 : Macron vs Le Pen.
Aussi voyons-nous s’installer une nouvelle stratégie macroniste. Cette fois-ci c’est : « ET Droite ET Gauche ». Le projet de Macron (du néo-libéralisme de l’Institut Montaigne et des économistes de Bruno Le Maire) c’est de continuer coute que coûte leur politique de «réformes» liberticides avec répression dans les rues, utilisation manipulatrice de la protection sanitaire etc. Programme économique de Droite donc, avec repression manu militari, d’un Darmanin (trouvant Marine Le Pen trop molle). Mais cela ne suffit pas à forcer un nombre suffisant de supporters de MLP à adhérer à En Marche. Alors, on fait joujou avec l’autre côté : le côté Gauche.

LREM TENDANCE GAUCHISTE.

J’avais signalé dès septembre dernier l’esbrouffe macroniste très réfléchie de se coloriser en « parti de gauche ». C’est une condition essentielle pour gagner en 2022. Voyez les tentatives de fin 2020 : Macron tente de créér une aile gauche avec l’appui de ses Medias-moutons. Mais ça ne marche pas car les pseudo-dissidents ne sont pas connus, n’ont aucun poids de notoriété auprès du public.

Alors que faire ? Hé bien, il leur faut envoyer les grosses pointures comme des ministres. Et c’st ainsi qu’Elisabeth Borne, ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion clame tranquillement (ne riez pas, ce n’est pas une plaisanterie) qu’elle «est de gauche». Attendons-nous donc à une déferlante pro-LREM, à un pilonnage hors-normes sur les écrans et micros généreusement ouverts pour tenter de nous persuader que ces fossoyeurs de la République sont de dignes héritiers de Jaurès et du programme du Comité National de la Résistance (programme à la fin de la Seconde Guerre mondiale, qui s’intitulait «Les Jours heureux»).

Du Luxembourg à « En Thérapie ».

La violence : c’est par elle que le néo-libéralisme peut tenir et prolonger son règne. Une violence qui passe par le physique (fatigue, usure, dépressions, rage épuisante, suicides, morts dans la rue etc). Une violence démultipliée par la pression exercée sur les corps en entreprise, dans le No Future des Pôles-Emplois, dans les mains tendues et les files d’étudiant(e)s aux Restos du Coeur.

Cette violence des deux dernières semaines, je l’ai trouvée dans la fraude fiscale au Luxembourg, sur les chaînes C8 et CNews, au Club select du Siècle et, pour terminer, je l’ai vue se déposer sur le divan de Philippe Dayan, le psy des 35 épisodes de la série d’Arte, « En Thérapie ».

L comme Luxembourg.

Souvenons-nous de la phrase-mensonge de Nicolas Sarkozy en octobre 2009 à la veille du G20 de Pittsburgh  «Les paradis fiscaux, c’est ter-mi-né» alors qu’aujourd’hui éclate le scandale de l’OpenLux. Sur les 50 familles françaises, 37 d’entre elles ont usé de la fraude fiscale, planquant des milliards dans les coffre-forts du Duché. De LVMH (Bernard Arnault) à BNP Paribas, de Kering (Pinault) à Total, tous ont des filiales dans les paradis fiscaux. Et l’un des plus importants – avec Chypre et Malte – c’est le Luxembourg. A un abonné qui se demandait si les membres ces grandes familles n’avaient pas honte, j’ai répondu – via Monique Pinçon-Charlot  L’Argent sans foi ni loi » Editions Textuel).

« Au sein de ces grandes familles, on apprend que le système capitaliste est le seul qui soit naturel et imaginable. Les autres systèmes de pensée n’étant qu’idéologies. Du coup, pratiquer l’optimisation fiscale voire la fraude fiscale avec le recours aux paradis fscaux, tout cela leur paraît aller de soi face à un Etat qui est à leurs yeux trop gourmand. Elles intériorisent tout un discours autojustificateur contre l’Etat et l’impôt, contre les fonctionnaires, pour que leurs biens restent dans la famille. Pour prendre la mesure de ce sentiment de non-culpabilité, il faut comprendre que les membres de ces grandes familles sont à longueur de journée ds l’élégance et la sociabilité mondaine de l’entre-soi».

Résumé : ces grandes familles ne vivent pas dans notre monde mais elles sont maitresses du nôtre.

P comme Pesquet & Praud

Après le passage de Mélenchon chez Hanouna, Pascal Praud a redoublé de haine envers le représentant de la France Insoumise. Probable que la fille de l’animateur (qui avait voté pour Mélenchon en 2017) l’ait à nouveau titillé en lui disant qu’elle n’irait pas toucher à son poste ce soir-là et qu’elle resterait sur C8.

Ailleurs, sur CNEWS, autre TV de la Honte, il suffit de deux minutes pour savoir de quoi il en retourne. Une habitante de Trappes, française musulmane, dit que dans sa ville « ce n’est pas du tout ce qu’on dit ». L’animateur Julien Pesquet, petite frappe bolloréenne, reprend l’antenne et s’en amuse en hochant la tête d’un air entendu. Son mépris ahurissant ira juqu’à chantonner en direction de cette femme alpaguée via un micro-trottoir : « C’est ça, c’est ça tout va très bien Madame la Marquise ».

Le respect Bolloré, quoi.

S comme Siècle.

La cohésion de la classe dominante est toujours déjà-là. Cette classe possède les médias (elle a placé des directeurs de télés et radios publiques, serviteurs zélés de la Macronie), elle a ses Instituts de sondages couplés avec la Presse, elle a ses réseaux avec ses think-tanks et ses Clubs multi-cartes. Aujourd’hui, c’est le Siècle qui est sur la sellette avec son président Olivier Duhamel mais cette surexposition s’accompagne d’un silence total sur toutes les autres instances de solidarité de classe, instances plus solides que jamais.

Au contraire des classes dominées pour lesquelles il faut sans arrêt se battre durement pour s’unir, la classe des riches est instantanément mobilisée via ces groupes et ses réseaux. Citons-les : Le Jockey-Club, le Cercle Interallié, le Cercle de l’Industrie, The Travellers, le Cercle MBC (beaucoup sont affilés au Siècle), le Club des Trente, les Gracques (où se côtoient les patrons du MEDEF et des Denis Olivennes patron de Liberation), le Club Démocratie. Rajoutons que toutes ses accointances leur sont facilitées car leurs réunions, leurs dîners se déroulent exclusivement à Paris.

T comme Thérapie.

J’ai suivi les 35 épisodes de En Thérapie mais je n’ai pas très bien compris la raison pour laquelle Ariane, Camille et le couple étaient venus en séance. Pour Ariane, est-ce le seul trauma (et rien d’autre) suite à l’attentat du Bataclan qui l’a poussée à consulter ? Camille, elle, vient voir le psy car elle a juste besoin d’un certificat demandé par les Assurances. Quant au couple, je suis surpris qu’en psy lacanien, Philippe Dayan accepte une… psychothérapie de couple.

Comme dans la série « Soprano », les réalisateurs d’En Thérapie ont installé une caméra au cœur des séances. Du coup, le surmoi du télespectateur vient doubler la place du patient et/ou celle de l’analyste. On tourne à trois. L’espace privé – condition incontournable du maintien et de la poursuite de toute cure – est devenu… public. Et le côté public fait qu’il y a des explications, des petits cours de psy pour télespectateurs moins avertis sur les fondements de la théorie freudienne. On peut en sourire.

On peut aussi relever que les moments de cure dans la série sont toujours vus à travers des paroles extraordinaires, petits coups de théâtre permanents qui éliminent tout «ennui». Est-ce ainsi dans la vraie vie d’une séance ? Et on peut noter que la contrainte de la fiction pousse à écrire une fin obligatoire – du coup, par ricochet – une fin de… l’analyse (finie la drogue ? Si facilement ?).

Les jeux de Frédéric Pierrot, de Reda Kateb et de la prometteuse Céleste Brunquell sont formidables. En situation, ils traduisent bien les effets de cette belle parole de Françoise Dolto qui est dans la droite ligne des enseignements de Freud et illustre bien le dispositif de la cure qu’il mit génialement en pratique : « Ecouter l’autre, c’est le faire exister ».

En contrepoint bienvenu, on applaudira la mise en scène champ/contrechamp qui ne laisse pas de place aux mouvements de caméra surexcités habituels (ceux de l’info), nous laissant avec un certain plaisir dans le temps, rare télévisuellement, de l’écoute et du laisser-parler.