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«Ce que je sais, c’est que, pour rester vivant au milieu du bûcher, être fidèle au feu qui m’embrase, c’est que, pour toucher au centre de gravité de la lectrice que tu es, mes phrases ont besoin simultanément de ta tendresse et de mon désespoir. En réciproque aussi. Sous l’écroulement de notre prime jeunesse, gardons plus que jamais des forces vives, des pierres brûlantes, des cendres chaudes. Mystère, Beauté de nos Vies à reconstruire, à remettre en partage».
*
Elle me disait : «Il est bon parfois de faire couple avec sa solitude».
Elle me disait : «Le poète ? Un ogre qui se fait manger».
Elle me disait : «Ce souhait qu’au cœur de tes mots, naisse une littérature à l’estomac».
Elle me disait : «Évite de demander l’âge à tes mots. A coup sûr, à leur réponse, tu te sentiras très vieux».
Elle me disait : «L’aphorisme est cette tortue sur le dos qui attendrait désespérément de son lecteur un retournement de situation».
Elle me disait : «La nuit, je m’efface derrière mes phrases. Et le jour, je les cherche».
Elle me disait : «J’écris trop vite. A vouloir le poème dès les premières contractions. Trop empressée de le voir naître».
Elle me disait : «J’écris trop lentement. A vouloir le poème à la délivrance. Trop peu pressée de le voir naître».
Elle me disait : «Le bavardage et la perfection sont les deux ennemis du poème».
Elle disait : «Les arbres ne sont pas tristes. Exceptés les saules pleureurs».
Elle me disait : «Jamais en lecture flottante, tu ne te noieras».
Elle me disait : «Ne laisse pas à l’auteur faire tout le travail. Sur chaque livre, tu as ton mot à lire».
Elle disait : «Seules les oreilles d’un fou peuvent entendre raison».
Elle disait : «Écorce singulière. Tronc commun».
Elle disait : «Passer la nuit avec son étoile bien-aimée. Espérant n’avoir pas à regretter son passage météorite».
Elle disait : «La meilleure façon de savoir si deux bons mots sont bien connectés, c’est l’explosion de rire qui s’ensuit».
Elle me disait : «S’étendre et s’étreindre. Avant de s’étendre et s’éteindre».
Elle me disait : «Des fois on tire la couverture du livre à soi. Des fois on la rejette vigoureusement des deux pieds».
Elle me disait : «Des fois, on ne sait pas ce qui se passe mais y a de la tristesse solennelle».
Elle me disait : «Facile le déshabillage en coulisses. Plus dure la mise à nu sur la scène sociale».
Elle me disait : «Je ne crois ni au bonheur dirigé, ni au bonheur. Plutôt à la bonne heure, aux minutes heureuses»
Elle disait : «La pire des choses, c’est peut-être bien de ressembler à tes ennemis».
Elle me disait : «Comme un chien, tu sors de l’eau, tu t’ébroues. Et voilà aussitôt le poème qui sèche sur ta page».
Elle me disait : «Le texte original de ton enfance est à jamais perdu. Sa réécriture occupera toute ta vie».
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Pour relire ses paroles consignées…
« Tu peux faire ton rève plus long que la nuit », proverbe juif.
«Je ne crois ni au bonheur dirigé, ni au bonheur. Plutôt à la bonne heure, aux minutes heureuses»
J’aime toujours ce qu’elle disait…..les minutes sont si précieuses….non ce n’est pas triste, les minutes merveilleuses, regarder un brin d’herbe bouger au rythme de la brise, la mer en toile de fond, une lumière magique …..des minutes …..
Elle était à notre table vendredi dernier?
« Nous n’avons qu’une ressource avec la mort, faire de l’art avant elle » René Char. Citation extraite d’Hadriana dans tous mes rèves de René Depestre.
Elle disait: «La nuit, je m’efface derrière mes phrases. Et le jour, je les cherche».
Moi aussi, mais je n’aurai pas assez de jours car l’inéluctable nuit définitive s’approche…