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Des textes, des photos m’appellent. Il serait vain d’y résister : la charge émotionnelle est si intense, si vitale que mon impulsion à voir se traduit immédiatement en texte. Saluer la Beauté de ce magnifique et troublant cliché de PFRunner (pris le 11 novembre dernier à Venise, Place Saint-Marc) devient impératif. Sur Twitter, j’en appelle aussitôt à l’auteur de la photographie : «J’ai envie d’écrire un petit délire fictionnel sur cette photo. Je sens les eaux, les vagues, la sauvagerie monter en moi». La réponse en retour ultra-rapide me suffira : «Fonce, ça me fait plaize !»
Dans le même temps, je tombais sur l’interview accordée à Georges Didi-Huberman par le Télérama de cette semaine. Historien de l’Art, un peu sociologue de l’image, philosophe, le bonhomme m’avait enchanté par son petit livre d’où j’avais tiré cet extrait :
«Il n’y a donc pas d’images qui, en soi, nous laisseraient muets, impuissants. Une image sur laquelle on ne peut rien dire, c’est en général une image qu’on n’a pas pris le temps — mais ce temps est long, il demande du courage, je le répète — de regarder attentivement. De se ré-inquiéter à chaque fois» (1).
Je ne sais s’il m’a fallu du courage mais, pas de doute, c’est l’inquiétude, un sentiment d’effroi qui ont dominé dès mon regard sur ce Venise-là.
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(1) «L’Expérience des Images». Auteurs : Umberto Eco, Georges Didi-Huberman, Marc Augé. Editeur INA (2011).
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Tirées de l’interview de Georges Didi-Huberman (dans le numéro de Télérama de cette semaine), quelques réflexions qui ne font pas cliché :
« A chaque fois, ce sont des objets singuliers qui m’intéressent. Je n’aime pas le définitif. Je n’aime pas définir, j’aime approcher, appréhender, interroger, ressentir et analyser les aspects multiples d’une chose, d’une œuvre, d’une image, d’un mot».
« Les images sont toujours plurielles, elles prennent position, c’est-à-dire qu’en se situant les unes par rapport aux autres dans un montage (comme les mots dans une phrase) elles créent des configurations».
« On ne regarde pas seulement avec les yeux, mais aussi avec son langage. L’opinion, en particulier l’opinion politique, tend à refermer le sens sur un seul mot, ce qu’on appelle – le mot d’ordre. Je cherche au contraire à ouvrir l’éventail. A prendre position à travers un dialogue constant entre un travail sur le langage et un travail sur les images».
« Il faut regarder toute image à travers l’exercice d’un double regard. L’image est un choc, un montage dialectique, au sens du dialogue mais aussi du conflit. Voilà pourquoi les images ne sont pas des objets, mais des actes. C’est un champ de bataille».
Venise est condamné à sombrer sous les eaux, d’ici 50 à 100 ans, de toute façon. Et ça c’est pas de la fiction !
@citation école.
Je vais te faire une autre confidence : suis aussi condamné à sombrer avant même 50 ou 100 ans moi aussi. Et ça, c’est pas non plus de la fiction 🙂