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Lever les zones d’ombre et de censure de plus en plus vastes, remettre en lumière le non-dit sur les «Chiens de l’Enfer» dont parle René Char. C’est via les cours retranscrits dans un Cahier de Morale par un écolier des années 1940-1944 que j’essaye de donner idée de ce que fut la Propaganda pétainiste qui ouvrit grand les bras aux Chemises Brunes nazies. Aujourd’hui, on a la mémoire courte, on laisse dire et on cuisine les quenelles sans objections, on accueille Marine avec des sourires gênés, on discute à mieux mieux de ses «arguments», on érige des Unes à son profit. Exemple : Hier, France-Inter…
Nous sommes au Journal de 13 heures. Avant toute autre info, le journaliste parle de la manifestation que va organiser l’extrême-droite suite au décès d’un jeune homme poignardé la veille près de la Tour Eiffel. Non seulement l’info est en Une mais on donne le lieu de la Manifestation et l’heure (14h30) ! L’Impensé devient Obscénité. Le plus grave n’est pas la Manif (il y a, il y aura toujours des crapules pour surfer sur les faits divers et tenter de les récupérer) mais la place qui lui est octroyée. On a donné une importance inespérée à cette Manif… sans commune mesure avec l’importance réelle des cris d’une centaine de pauvres agités.
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MAI 1941.
MAI 1941 : Philippe Pétain fait un beau discours pour le Premier Mai 1941 : «Le 1er mai a été, jusqu’ici, un symbole de division et de haine ; il sera désormais un symbole d’union et d’amitié parce qu’il sera la fête du travail et des travailleurs». Les grands axes ? Travailler dans la joie et la concorde, comme le récitent les écoliers de France. Un mois après ce beau discours d’«Union et d’Amitié», du 27 mai au 9 juin, le «bon ouvrier» fait la grève dans le bassin minier du Nord–Pas-de-Calais. Plusieurs centaines de personnes sont arrêtées. 270 mineurs sont déportés en juillet en Allemagne ; 130 y laisseront la vie.
29 MAI 1941.
MAI-OCTOBRE 1941. Chasse à l’ouvrier récalcitrant : le 4 octobre 1941, Vichy promulgue la Charte du travail interdisant grèves et lock-out. Chasse aux Juifs : 15 jours avant ce Cours de Morale, le 14 mai 1941, à Paris, s’organise la première rafle de juifs étrangers par la Préfecture de Police.
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JANVIER 1942.
JANVIER 1942 : Les lois de Vichy ? Chasse aux Juifs, chasse aux Résistants qualifiés de «terroristes». A l’entrée du camp de Beaune-la-Rolande, l’officier de Police français inscrit «terroriste» sur la fiche de l’enfant juif âgé de 5 ans.
11 jours avant ce Cours de Morale, les Nazis règlent les derniers détails de la solution finale de la question juive à la Conférence de Wannsee (Berlin). Deux mois après ce Cours de Morale, le 6 mai 1942, Reinhard Heydrich, adjoint d’Heinrich Himmler, rencontre René Bousquet (celui-là même qui, bien plus tard, dînera avec son ami François Mitterrand à la table de Latché). L’entrevue jette les bases d’un accord de principe engageant la collaboration de la police française. Le 29 mai 1942, en Zone occupée, le port de l’étoile jaune devient obligatoire.
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MARS 1943.
4 MARS 1943 : Trois semaines avant ce Cours de Morale, le convoi N° 50 est le premier à partir de Drancy pour le camp de Majdanek.
En février 1943, suite à un attentat contre des Officiers de la Luftwaffe à Paris, le commandement Allemand demande en représailles l’arrestation en France de 2000 juifs à Villeurbanne. Le 1er mars 1943, la Milice et l’armée Allemande d’occupation se charge de la rafle en arrêtant trois cents hommes. Cent quatre vingt d’entre eux sont conduits vers la gare d’où ils partent pour Compiègne. Ils y resteront un mois et demi. Les associations d’entraide et une délégation municipale se rendront à Compiègne pour rencontrer les prisonniers. Aucun ne sera relâché et c’est dans le camp de Mathausen que deux tiers des 180 raflés de Villeurbanne trouveront la mort. Les Miliciens : pour Pétain, des «modèles », des «héros» dont les petits écoliers doivent s’efforcer de s’approcher.
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DÉCEMBRE 1943.
Pour ces écoliers, la Propagande Pétain célébrait son Chef. Vichy demandait à chacun la soumission volontaire à ses lois (scélérates). Au même moment, dans la Patrie pour laquelle les Français devaient «rester fiers et dignes», le Commandant de Drancy, le SS Aloïs Brunner, surveillait le départ d’un convoi de déportés du 17 décembre 1943 sur le quai de la gare de Bobigny. Trouvant un petit couteau à éplucher les pommes de terre dans le sac du déporté Georges Sander, le SS lui coupa l’oreille. Au même moment encore, le 31 décembre 1943, Pierre Laval faisait entrer au gouvernement des collaborateurs plus déclarés, sinistres crapules d’extrême-droite aux noms de Brinon, Henriot, Darnand.
On rappellera que le concours prêté par Vichy aux Allemands fut décisif. Les occupants n’eurent en effet plus le souci des opérations policières effectuées en zone libre et aussi en zone occupée. De cette complicité délibérée, rien ne pourra jamais laver le régime du Maréchal Pétain. Au Danemark (et même en Bulgarie), aussi asservis furent-ils, les gouvernements n’adoptèrent pas cette position honteuse. Nul «Statut des Juifs», nul «Commissariat aux Questions Juives» chez eux.
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Dialoguer ? Échanger sur le programme du FN ? Blablater dessus ? Avaliser ses « nouveaux » costumes ? Dans son livre «Apaisements», Charles Juliet rapporte cet épisode : « Une femme juive internée se trouvait dans la cour du camp lorsqu’est arrivée une colonne de déportés dans laquelle elle a reconnu son père. Elle lui a fait signe. Un SS a remarqué son geste. Il lui a demandé à qui il s’adressait. Elle a répondu qu’il s’agissait de son père. Le SS lui a permis d’aller jusqu’à lui. A l’instant où elle s’apprêtait à l’embrasser, le SS l’a exécuté ». Avec l’extrême-droite, c’est toujours comme ça que les histoires se terminent.
Pour mieux lire les feuilles de cet écolier, cliquez sur l’image pour l’agrandir.
Ce décalage (illustré par cet article) entre la morale que l’on nous enseigne et une réalité atroce existe toujours. Nous sommes nombreux à considérer que les discussions qui banalisent le programme du FN sont dangereuses mais dans le même temps nous restons impuissants voire insensibles au fait que notre façon de vivre ici en France impose ailleurs des conditions de vie digne des camps de concentrations. Les donneurs de leçons ici sont les mêmes qui profitent du travail des petites mains des esclaves en Asie, en Afrique…Ce qui se passe en France et en Europe c’est déjà passé, ce n’est qu’une énième répétition qui touchent successivement tous les continents. « Vous le savez déjà, moi aussi.Ce ne sont pas les informations qui nous font défaut. Ce qui nous manque, c’est le courage de comprendre ce que nous savons et d’en tirer les conséquences » Sven Lindqvist