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Lorsque je regarde les peintures, les dessins, les aquarelles de José Hernandez, je prends peur. Pas de celle qui fait fuir mais plutôt de cette peur qui vous immobilise et vous pétrifie. Puis lentement, le regard commence à s’habituer. Enfin, je crois que mes yeux s’habituent. En réalité, non.
C’est mon regard qui change : on est dans le dantesque, on vire au vertige. Rien ne sera plus comme avant. La contagion gagne, les peaux sont à rude, très rude épreuve. Les muscles se tétanisent. Les pensées battent la campagne. Les insectes laissent des trainées, ils vous attaquent. Les chrysalides sont vénéneuses. Toutes les figures ont un visage abîmé. A votre tour de tomber en abîme. Les murs de José Hernandez ne soutiennent que votre peur du Vide. Ses portes sont des bouches d’ombre : vous vous demandez sur quel univers elles s’ouvrent. D’ailleurs, il n’y a pas de portes : ce sont des trous béants, des troublants trous noirs.
José Hernandez dit qu’il est un Optimiste désespéré. BiBi est moins catégorique dans sa vie, disant à qui veut l’entendre dans le Désert du Sens que, lui, est un Optimiste de plus en plus inquiet.
José Hernandez a créé toutes les affiches des films de Luis Bunuel. Celui-là même qui m’arracha un sourire (plutôt un rictus) lorsqu’il disait mi-sérieux, mi-moqueur qu’il « aimait la Solitude…à condition de pouvoir en parler à quelqu’un ». Le drame, c’est qu’il n’y a pas d’échos, de feed-back. Parfois. Les travaux de José Hernandez nous disent ce Silence.
Lorsque BiBi est tombé sur ces deux arbres, il y a vu sa mère accrochée aux branches (généalogiques). Il y a vu du bois fendu, des rameaux incertains, il y a repéré cet équilibre instable. Un arbre improbable, sans feuilles et sans racines connues. Un arbre en coupe peu franche face à un autre arbre, imperturbable cette fois.
BiBi se souvint alors avoir lu ces quelques vers d’un poème que Winnicott, le pédiatre anglais, avait adressé à son beau-frère, à l’âge de 67 ans. Il y faisait référence à l’arbre de la Maison de son enfance sous lequel il aimait faire ses devoirs. Ce poème s’appelait « The Tree » :
Ma mère sous l’arbre pleure, pleure, pleure
C’est ainsi que je l’ai connue
Un jour étendu sur ses genoux
Comme aujourd’hui dans l’arbre mort
J’ai appris à la faire sourire
À arrêter ses larmes
À abolir sa culpabilité
À guérir sa mort intérieure
La ranimer me faisait vivre.
Les œuvres de José Hernandez, exposées jusqu’au 3 mai 2008 à la Galerie Broutta, 31 Rue des Bergers à Paris, vous attendent de pied ferme et de cœur anxieux.
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