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Quelle ne fut pas la surprise de BiBi lorsqu’il ouvrit ce dimanche les pages 2 et 3 du JDD ! Claude Askolovitch y clamait que la « rentrée échappait » à un Little Nikos devenu subitement le « Président des Impôts », que le Chef de l’Etat était un « pragmatique dans l’impasse » et qu’il faisait « des choix irréalistes ».
Le JDD, le journal favori de BiBi, adoptait un ton à la Che Guevara. Tous les articles avaient une tonalité maoïste et jusqu’au-boutiste. Pour un peu, Claude Askolovitch et Nicolas Prissette déployaient le Drapeau Rouge et nous encourageaient à lire Le Capital. Du jamais vu ! Les deux journalistes de Frère Lagardère se faisaient porteurs de la grogne populaire et allaient même jusqu’à se moquer de Martin Hirsch qui avait pourtant doté la France d’une extraordinaire mesure.
BiBi, KO debout, chancelant, groggy, prêt à jeter l’éponge, s’enfonça dans son coin, tenta de reprendre son souffle coupé en même temps que ses esprits. Quoi ? Quoi ? Le JDD devenu gauchiste ?
Mais peu à peu, le brouillard se dissipa dans l’esprit ankylosé et momentanément hagard de BiBi : l’Heure n’était pas encore à la Fraternisation des Classes.
BiBi reprit posément le titre de la première page (« Impôts : le gouvernement piégé ») et l’examina sous toutes ses coutures. Comme tout écolier, il fit la différence entre la voix active – le Sujet fait ronronner le Verbe – et la voix passive – le Sujet subit l’action et laisse faire la « fatalité ». Car BiBi, rédacteur aux commandes, aurait plutôt écrit : « Impôts : le Gouvernement piège les Français ». Le choix de la Voix passive pour son gros titre venait tempèrer quelque peu la fougue révolutionnaire de nos deux journalistes et dégonflait ce qui parut en première lecture comme une incroyable Fronde des remplaçants d’Alain Genestar.
Et le ciel continua de s’éclaircir : BiBi se souvint que le Journal du Frère Lagardère devait gagner des lecteurs et éviter des pertes à tout prix. Bien évidemment, le lectorat du JDD n’est pas circonscrit aux seuls (é)lecteurs fidèles de Little Nikos. Le journal se devait de mordre aussi à gauche.
Rappelons :
1. que la Censure journalistique d’aujourd’hui n’est plus celle des Années noires d’avant 68 où les rédacteurs en chef écrivaient directement (ou discrètement) leurs articles sur les tables du Ministère de l’Information,
2. que nous sommes dans une période où la France est bien loin de vouloir se jeter dans les bras de la Gauche, vu ce qui s’y passe. Un NPA microscopique. Un PCF invisible. Un PS incroyablement absent. En jouant aux Gauchistes (de Salon), Claude Askolovitch et Nicolas Prissette, nos deux guérilleros de la Plume, n’ont rien à craindre. Ils peuvent vider leurs cartouches sans mettre en pétard leurs Patrons.
3. qu’aujourd’hui, la bataille de la Concentration des moyens d’information a été gagnée par le Quintet Little Nikos- Lagardère-Paolini- Bolloré-Pinault qui désormais n’a plus rien à craindre des Voix contraires. « Que Claude et Nicolas (Prissette) s’amusent un peu, qu’ils s’amusent, ces petits diables ! »
Reste qu’il faut vendre le torchon à ce cochon de payant. Et pour cela, obligation de se faire porteurs du climat de grogne, sortir les dents de devant (en assurant les arrières), reprendre les critiques du Populo.
Subtile manipulation, pense BiBi admiratif. Mais plus subtil encore, BiBi la dévoile lorsqu’il remarque que les premiers opposants sont internes à… l’UMP. Citons : Alain Lambert, ancien ministre du Budget, Jean-François Copé, Gilles Carrez rapporteur du budget à l’Assemblée, Eric Woerth (« un soldat qui fait front »). La manipulation se confirme à la seconde opposition… celle de… Michel Rocard, si fier de son CSG. C’est que le bougre porte haut le drapeau de la Contestation, stigmatisant d’abord l’égoïsme de la Société (« ça fait un moment que la valeur solidarité est en baisse ») avant d’ajouter implacable : « Le RSA est une bonne réforme. Elle est la suite du RMI telle que je l’aurais souhaité ». Au sujet de Fillon, Michel se fait dur, très dur : « Fillon est un homme raisonnable et raisonnablement compétent. Il fait ce qu’il peut ». BiBi trouve que ce Révolutionnaire exagère un peu et qu’il met – comme à sa vieille habitude – un peu trop d’eau dans son Rocard.
Ces airs guevaristes, ces folles phrases comme sorties du Petit Livre Rouge sont aussi là pour montrer autre chose. Notre brave et courageux Claude Askolovitch – transféré de Marianne au JDD – veut prendre tous ses détracteurs à contre-pied. Il veut répondre à ces méchants critiques qui le prennent pour un Suppôt du Capital, un Chien de Garde dans la niche Lagardère. Alors, pour montrer de quoi il est follement capable à qui veut bien le lire, voilà notre intrépide Claude éructant comme Lénine en 17, comme Thorez avant son départ en URSS, comme Marchais devant Elkabbach.
BiBi rajuste ses gants.
Il a à peu près récupéré après avoir failli subir un KO retentissant. Il repousse son tabouret et se jette à nouveau sur le ring. Il est redevenu confiant… ayant partiellement su lire dans les mots et les gestes de son adversaire, concluant que le « gauchisme » est désormais devenu la Maladie infantile du…Capitalisme.
Au coup de gong, BiBi serre les poings et les dents plus que jamais. C’est qu’il ne faudrait pas oublier : pour BiBi, le Combat continue.
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